Ce n’est pas une blague, Bob DYLAN sort un album de chansons qui ont toutes été interprétées par Frank SINATRA. On ne peut pas imaginer desunivers plus différents, entre Francky le chanteur à la voix (et l’œil) de velours, en smoking et nœud papillon qui roucoule suavement devant un parterre de rombières enamourées de Las Vegas et notre Bobby avec sa voix de canard, son look d’hidalgo de foire à bestiaux, et qui balance son show dans une salle du Never Ending Tour.

L’enregistrement s’est effectué au célèbre et mythique Studio B de Capitol Records, à Los Angeles, avec Jack Frost à la production (c’est le nom de guerre de DYLAN qui donc se produit lui-même) et mixé par Al Schmitt, 84 ans au compteur et qui a bossé, entre autres avec ELVIS et… Francky; Le groupe de Dylan, Tony Garnier (basse), Donny Herron (pedal steel guitar), Charlie Sexton et Stu Kimball (guitares), George C. Receli (percussions) est là et tout s’est fait en prises directes, comme le dit le Zim dans sa première interview depuis trois ans "Si Franck Sinatra avait écouté cet album, il serait certainement stupéfait que je l’aie réalisé avec un groupe de cinq musiciens. Je pense que d’une certaine manière ça l’aurait rendu fier". Petite précision cet entretien a été donné à l’AARP (association américaine des personnes retraitées), espérons que Never Ending Tour ne va pas faire la tournée des maisons de retraite avec ce répertoire !

Tous les titres sont anciens de 1920 à 1960 avec notamment "Autumn Leaves" la version anglaise des Feuilles Mortes de PREVERT et COSMA.

Clairement on reste dubitatif après écoute. Déjà entre la voix en studio et celle du live, il existe une énorme différence ! DYLAN sur scène casse les couplets, déclame plus qu’il ne chante, ici il chante de façon classique. Certes sa voix "accroche" un peu mais dans l’ensemble cela rend bien. Et puis l’accompagnement : les musiciens font patte de velours, ambiance cool, genre on se boit un drink au bar d’un grand hôtel pendant que le groupe joue une musique d’ambiance.

Alors l’exercice est assez réussi, mais la vraie question est quelle en est l’utilité ? Soit DYLAN se fait vraiment plaisir et là pas de problème, il avait fait déjà le coup avec un album de chants de Noël. Soit il n’a plus trop envie d’écrire de nouvelles chansons et là c’est franchement dommage car Tempest, c’était tout de même autre chose que les roucoulements d’ombres dans la nuit. Pourtant, ce disque, intrinsèquement n’est pas mauvais, assez réussi même, et alors ? On s’en fout que DYLAN nous la joue crooner, qu’il ressorte des vieilles chansons, le DYLAN qu’on aime est loin de cela. Je sais bien qu’il s’en moque comme de son premier harmonica, qu’il ne veut rendre de comptes à personne, surtout pas à son public, mais rien n’oblige justement son public à se laisser embarquer dans cette aventure vaseuse sans queue ni tête.

Certes je suis un peu partial... vu que SINATRA (incontestablement une superbe voix) m’a toujours profondément gonflé, et représente tout à fait ce que je n’aime pas dans la musique américaine. Alors Bobby, reprends ton stylo, bouges toi un peu les neurones, et sors nous encore quelques bon textes avant d’aller faire pleurer les nostalgiques de Franck dans les casinos !