AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Attendu comme le loup blanc, le biopic consacré au début de la carrière de Bob DYLAN, avec en point d’orgue son passage (mouvementé) de l’acoustique puriste vers l’électricité honnie, réalisé par James Mangold, a fini par sortir sur nos écrans au début de l’année 2025 (mais fin 2024 aux States). C’est Timothée Chalamet qui endosse l’écrasante tâche d’incarner le barde de Duluth, non seulement lors des scènes de comédie mais aussi –et surtout- en interprétant au chant, à l’harmonica et à la guitare toutes les chansons inscrites au menu de sa B.O. Une gageure. Mais il n’est pas le seul dans son cas puisque Edward Norton (Pete SEEGER), crédité au chant et au banjo, Monica Barbaro (Joan BAEZ), au chant et à la guitare, ainsi que Boyd Holbrook (Johnny CASH), au chant, y vont chacun de leur performance. Ils sont forts, ces ricains, y’a pas à dire. Timothée, quand même à moitié frenchy, a passé cinq années à bosser la zique façon DYLAN afin de pénétrer au mieux dans ses boots, aidé en cela par la période pandémique (et accessoirement par un coach), vu qu’il n’avait que ça à foutre. Et il a vachement bien bossé. Les autres aussi par ailleurs, même s’ils sont bien moins présents, sujet du biopic oblige, mais nous y reviendrons.

S’agissant des parties de guitare, reproduites par Timmy au plus près des originales, c’est déjà assez bluffant sachant que DYLAN est, ou plutôt était, étant donné que l’arthrose s’est chargée de l’éloigner de sa pratique, un excellent guitariste rythmique. Mais, comme de bien entendu, c’est à la voix qu’on prête aussitôt attention, cette voix si particulière qui ne fait pas consensus du fait de son timbre nasillard pouvant occulter le talent hors norme de mélodiste de l’artiste qu’il reprend. Petite anecdote personnelle : pendant longtemps, je n’aimais pas DYLAN, pas plus que ses chansons, à cause de sa voix mais lorsque j’entendais un de ses titres repris par un/une autre je trouvais qu’il était super. Alors ici, Timothée chargé d’interpréter Bob façon DYLAN fait de son mieux pour coller à son empreinte vocale, même s’il le pastiche plus qu’il ne l’imite. Or c’est très bien ainsi, même si depuis un –long- moment je n’ai plus aucun problème avec la voix de son modèle. Ce parti-pris évite de sombrer dans le ridicule tout en restant respectueux. De même, les conditions d’enregistrement de la B.O reproduisent celles qui prévalaient au début des 60’s, on ne cherche pas à moderniser le catalogue dans lequel on va puiser. Les titres acoustiques comme électriques sonnent d’époque, ils restent chaleureux et c’est un nouveau bon point.

Côté guests, Edward Norton assure au banjo, il chante (bien), c’est celui qu’on entend le moins entre ses vocalises sur "Wimoweh (Mbube)" (soit "Le Lion Est Mort Ce Soir" en V.F) et son duo avec Timothée pour "When The Ship Comes In". Boyd Holbrook est à peine plus présent en délivrant deux interprétations convaincantes, soit "Folsom Prison Blues" puis "Big River". Les deux, Norton et Holbrook, sont très crédibles, no soucis. C’est, sans surprise, Monica Barbaro qui occupe le plus de place dans cet aréopage de seconds rôles. Trois fois seule avec "There But For Fortune", écrite par Phil OCHS, une légende la scène folk US, ou encore "Silver Dagger", une ballade folk tirée du répertoire traditionnel promu par tous les artistes de cette scène en plein boom à cette époque, puis avec "House Of The Rising Sun", autre titre traditionnel qui deviendrait une véritable tarte à la crème après son adaptation en single par les ANIMALS. Cependant, la version livrée ici, d’abord accompagnée à la guitare, puis a capella, tranche avec toutes ses versions les plus connues, celle de Johnny notamment. Du coup, elle figure parmi les surprises du disque. Après quoi, en entend Monica et Timothée en duo sur pas moins de quatre classiques signés DYLAN que sont "Girl From The North Country", "Don’t Think Twice It’s Alright", "Blowin’ In The Wind" et "It Ain’t Me Babe". Carré d’as de la morkitu ! Alors, oui, Monica ne possède pas l’organe vocal de Joan BAEZ, c’est certain et c’est de toute façon mission impossible de parvenir au niveau de la chanteuse américaine. Je le dis d’autant plus facilement que je ne suis absolument pas fan de cette grande dame. Mais voilà, Monica, en plus de très bien chanter (tout de même), met toutes les intentions possibles pour parvenir à relever un défi plus que casse gueule. Gagné !

Côté track-listing, peu de surprises donc, le mec DYLAN, dès ses débuts, ayant pondu un paquet de songs devenues des classiques mais citons tout même les moins courues que sont "I Was Young When I Left Home", "It Takes A Lot To Laugh, It Takes A Train To Cry" ainsi que "Song To Woody", cette dernière, première chanson de DYLAN jouée dans le film, se trouve reléguée au bout du CD de la B.O . Qualitativement parlant, rien n’est à jeter dans ce skeud. Les disques de reprises, or celui-ci en est un, sont le plus souvent assez vains nonobstant la qualité des interprètes qui sont inscrits sur leur line-up, pourtant force est de constater qu’en dépit du fait qu’aucune liberté n’a été accordée aux intervenants sur cette bande son, un véritable supplément d’âme point à chaque moment de sa lecture. Je garde même pour la bonne pioche la version, livrée par un Timmy en feu, de "Masters Of War" qui vient illustrer une des scènes les plus impactantes du film. Bien entendu que j’ai TOUS les albums de DYLAN de cette époque et que donc cette B.O ne saurait concourir au titre d’œuvre indispensable. Pas plus qu’elle n’est condamnée à manger la poussière sur étagère tant elle parvient à procurer du plaisir. Et c’est bien là l’essentiel.

Note réelle 3,5 parce que quand même, ça fait plez !