AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Blue Hawaii ou quand un embarras monstre naît dans l’esprit clair du chroniqueur. Les vagues du Pacifique servent d’écrin au plus grand succès cinématographique du King, et ce skeud à la pimpante couverture locale nous offre quelques joyaux impérissables, traduisez 'Elvis nage dans des flots de guimauve'.

Dès le premier morceau éponyme, les guitares hawaïennes annoncent la couleur : du sirupeux pur sucre ! Petit slow tranquille chargé d’un esprit pacifique, "Blue Hawaii" n’est pas mémorable. Egrenons sans autre préambule ces chansonnettes sans relief sur lesquelles – c’est certain – ne flotte aucun drapeau confédéré synonyme de rock’n’roll : "Ku u i po" pour une bonne sieste, "Moolight Swim" pour ne pas se réveiller, les traditionnels "Aloha ohe" et "Hawaiian Sunset" traversent vos rêves sans les troubler aucunement. "Island of Love" et "Hawaiian Wedding Song" sont désespérantes d’ennui. Damned ! Le skeud est bourré de chansons pour grands-mères amatrices de Frédéric François.
Dieu merci, quelques rayons de soleil transperçant cette épaisse couche sirupeuse communiquent avec les centres du plaisir : "Can’t Help Falling In Love" est l’un des plus grands slows de l’histoire de la musique, c’est indéniable : la mélodie est imparable, le chant d’Elvis atteint un zénith sur cette ode amoureuse, toujours d’actualité puisque UB40 l’a reprise il n’y a pas si longtemps. Un des plus grands titres d’Elvis PRESLEY, qui ne dépareille pas face aux "Loving you" ou "Anyway you want me" des années de gloire.
Dans le nouveau style rock’n’roll d’Elvis, mélodie catchy mais zéro agressivité, nous avons "Almost Always True", "Slicin Sand" ainsi que le morceau emblématique "Rock a Hula Baby" qui pour cette dernière renoue presque avec le ton du 50 000 000 fans, mais une composition rock par album, ce n’est pas bien lourd. On regrette l’absence de Scotty Moore, mais finalement on le comprend.

Cet ensemble hétéroclite passe vingt semaines à la tête du Billboard américain. C’est à n’y rien comprendre, ou alors cela signifie que les gènes des admirateurs de la Star Ac’ et autres incongruités télévisuelles étaient déjà dans le métabolisme de nos parents et arrières grands-parents.
Voici la plus grande réussite financière du Colonel Parker ; le méga succès Blue Hawaii ouvre la porte à toutes les fenêtres. Eh ouais ! La liste des navets qui suivra est longue. Elvis est désormais un acteur qui chante, plus que le contraire, c’est donc un brutal arrêt à sa carrière de performer. Jusqu’à son 68 come back, le King ne donnant aucun concert se contente des B.O. de ses films, souvent inégales. Quelle perte pour la musique ! Nous devrions dresser un monument ordurier à la mémoire de feu le 'colonel Parker', qu’il croupisse en enfer !

Je mets 2/5 à ce chef-d’œuvre de mollassonerie, un pour l’immortelle "Can’t Help Falling In Love", 0.5 pour "Almost Always True" et "Rock a Hula Baby" ; le reste me fait gerber.