Si le premier album gospel d’Elvis sent bon la petite église du sud des U.S, il n’en est pas de même de ce deuxième tome des aventures du King en prédicateur -saviez-vous que Jimmy Sweaggart, le plus célèbre des télé-évangélistes, était un cousin germain de Jerry Lee LEWIS ? Y'a pas de hasard. C’est Rock, la religion ! Ce deuxième opus donc est une velléité de ce brave Colonel Parker - vous me direz qu'il n'en est pas à une connerie près ! Il faut investir les radios mainstream U.S, c’est une priorité pour le faux colonel qui a humé l’odeur des billets verts. Comprenez que toucher 50% des royalties d’Elvis ne lui suffit pas en cette décennie des sixties.

Alors Dieu merci, il s’agit toujours d’un disque d’Elvis, même s’il est préfabriqué. Sa voix est toujours au sommet, même si souvent desservie par des titres médiocres. Il faut tout d’abord signaler la présence d’un méga-hit pour kingounet - eh oui, nous sommes en 67 ! Dur dur! - il s’agit de l’inusable "Crying in the Chapel" qui n’a de gospel que l’excuse d’un titre racoleur, un slow dans une veine plutôt doo wap, très mélodique, un giga succès du king en tout cas, number one du top 100 U.S. Le dernier sera "Suspicious Mind" en 73.

Le titre du skeud a été choisi pour le neuneu de base américain :  Comme tu es grand!. Imaginez un instant un titre pareil dans l’hexagone, même chanté par l’idole des jeunes, notre Johnny national, pas sûr que cela aurait marché. Le titre est moyen d’ailleurs, un rien larmoyant. Les dégoulinades sont d’ailleurs moins fréquentes sur "His Hand in Mine" comme sur "Without Him". Elles sont en sus plus efficaces, on se croirait devant une chorale d’église. Il n'y a guère que "Where No One Stands Alone" qui soit qualitativement un brin inférieure aux autres.

Je suis extrêmement fana de "Somebody Bigger Than You and I" où la voix du King ne laisse aucun doute sur la puissance de ce titre dont douceur et mélodie sont les maîtres mots. L’adjectif qui convient le mieux est sans doute 'immaculée". Elle est suivie par "Farther Along", le symbole même de ce que j’apprécie dans le gospel. Cette chanson évoque la famille, Noël, les réunions heureuses, les cadeaux, la joie et la quiétude d’une nuit pleine de rêves doux. "Stand By Me" n’est pas la reprise de Ben.E. King, mais une autre complainte liturgique, douce et simple. La voix d’Elvis en tire une certaine quintessence.

Le ton swinguant de "So High" lui donne une identité rock rafraîchissante, tout comme la superbe "Run On" qui ne dépareillerait aucunement sur un des albums rock classiques du King. C’est la même conclusion à laquelle j’arrive concernant "If the Lord Wasn’t Walking by My Side". Voici trois titres qui font honneur au gospel.
Enfin "Where Could I go but to the Lord", malgré des paroles à la limite de la débilité profonde selon nos oreilles européennes, sera désormais un des incontournables d’Elvis en concert jusqu’à la fin de sa vie.

Nous allons de surprise en surprise ! Qui aurait cru que les albums gospels d’Elvis Presley seraient si performants ? Pas mon âme adolescente d’alors, je vous l’assure. C’est donc un bon coup de pied dans la fourmilière de ses détracteurs que le King vient d’asséner avec force.
Et mine de rien, ça me fait drôlement plaisir !