Wise After the Event paraît à un moment décisif de la carrière d'Ant. Alors que The Geese And the Ghost fraîchement sorti obtient son petit succès et permet à son créateur de se faire un peu remarquer, une grande maison de disques, Arista, propose à ce dernier de signer un contrat. Le succès étant quand même maigre, Ant doit faire rapidement ses preuves.

Comme je l'ai dit dans ma chronique de The Geese And the Ghost, il est inutile de chercher à retrouver à tout prix l'ambiance bucolique et champêtre du premier album. Wise After the Event se démarque de plus par le fait qu'il est le seul album de la carrière d'Ant à n'être composé que de chansons. Même après les remasterisations, on ne trouve aucun instrumental, ce qui est tout à fait étonnant quand on connait un peu le bonhomme et sa démarche musicale. Mais c'est ce qui fait le charme de ce deuxième album où quelques tentatives de "tubes" ("Moonshooter", "We're All as We Lie") rencontrent quelques pavés baignant également dans un registre soft-pop et sur lesquels on a saupoudré un peu de progressif symphonique ou rock ("Now What ?", "Wise After the Event"). Soft-pop dans laquelle Ant a tenu à garder quelques guitares acoustiques ou du piano (comme sur "Regrets" ou l'on trouve même un orchestre un peu "lourd") conférant aux chansons un fort côté "mauvaise saison", sans parler de la noirceur de certaines ("Regrets", "Squirrel"). Dans la plupart des cas, on ne peut que rester admiratif devant la qualité des compositions et l'homogénéité de l'ensemble. "We're All as We Lie", en plus d'avoir été le seul single, illustre très bien à lui tout seul la magnifique pochette de Peter CROSS (qui a fait la plupart des pochettes d'Ant de 1977 à 1992). "Now What (Are They Doing to My Little Friends) ?" (une plainte en faveur des "petits amis" de Dieu : les animaux) et "Wise After the Event" représentent deux longues pièces d'orfèvre chacune dans leur style, tandis que les "Moonshooter", "Greenhouse", "Paperchase" ou même "Birdsong" émeuvent par des refrains d'une grande innocence et tout simplement magnifiques à l'oreille.

Il y a juste un souci, un gros souci qui m'empêche de conseiller ce Wise After the Event avec encore plus d'assurance que l'album qui l'a précédé : le chant. Ant a choisi ici de s'imposer comme seul vocaliste (quitte à faire croire qu'il a laissé le soin des guitares et claviers à d'autres, mais on ne me la fait pas ! THE VICAR et VIC STENCH ne sont autres que lui-même), et comme il est loin d'être pro, selon les moments, ça passe ou (surtout) ça casse. C'est vraiment dommage, d'autant plus que je lui reconnais un timbre magnifique, différent de celui qu'affichera son ancien comparse Tony BANKS, mais dans la même lignée "juvénile". C'est ce qui fait que Wise After the Event n'obtient que quatre étoiles sur cinq à mes yeux, et non cinq comme il l'aurait pu, voire dû. Notons aussi l'apparition de musiciens très importants pour le petit groupe d'Ant, à savoir Michael GILES, tout premier batteur de KING CRIMSON ; John G. PERRY, ancien bassiste de CARAVAN ; Rupert HINE, formidable producteur, et comme intervenant ponctuel Mel COLLINS (lui aussi ex-KING CRIMSON). De quoi faire baver un peu plus...