Is It Loud Enough ? Le titre de ce nouveau coffret consacré à la première partie de carrière du MICHAEL SCHENKER GROUP est, les amateurs l'auront vite compris, extrait des paroles d'un des morceaux emblématiques du groupe, "Armed and Ready". Mais le MSG a-t-il réellement été un groupe, ou plus l'expression personnelle des désirs créatifs du torturé prodige Michael Schenker ? Dans sa première incarnation, en tous cas, la formation est plus un assemblage de talents que la volonté d'une émulation artistique commune et d'une vision partagée. Au départ, nous retrouvons le bassiste Billy Sheehan (MR BIG, entre autres), le batteur Denny Carmassi (MONTROSE, HEART), et le chanteur Gary Barden. Mais la cohésion est fragile, et seuls subsistent, avant la dissolution de cette première incarnation, quelques enregistrements tirés des répétitions de l'éphémère quartet. Les débuts du MSG sont à l'image de ce premier line-up bancal : Michael Schenker, fragile et incertain, ne sait pas vraiment quelle direction prendre. Ce qu'il sait, c'est qu'il ne veut pas sonner comme AC/DC, ce qui génèrera de nombreuses discussions houleuses avec son manager Peter Mensch, qui souhaite recruter le producteur Mutt Lange pour se charger de la mise en boîte de ce premier album. Le manager, toujours lui, fait également le forcing pour que Michael fasse appel au chanteur David Coverdale (DEEP PURPLE, WHITESNAKE), et le guitariste fait l'effort de se rendre chez le bellâtre anglais pour composer avec lui un morceau, un partenariat éphémère, Coverdale ne souhaitant aucunement quitter WHITESNAKE. Finalement, après le retour au bercail de Gary Barden, l'arrivée de Mo Foster (basse) et Simon Philips offre une stabilité de courte durée permettant l'enregistrement d'un premier album remarquable.

Cet album sobrement intitulé The Michael Schenker Group et publié en 1980 est le premier des 6 CDs présents dans ce coffret, qui présente dans une version nouvellement masterisée l'ensemble des enregistrements studio du groupe réalisés entre 1979 et 1983, soit 66 morceaux au total. S'il manque les répétitions enregistrées avec Cozy Powell datés de 1979 (et que les fans connaissent déjà), ce menu se fait plutôt roboratif. Il aurait été sympathique de retrouver ici le live One Night at Budokan, mais ce serait ici faire la fine bouche. Nous trouvons donc ici quatre albums studios : The Michael Schenker Group, MSG, Assault Attack et Built to Destroy, présenté deux fois, avec son mix et son ordre européen et américain. S'ajoutent un album de démos et de prises alternatives, ainsi qu'un CD présentant du matériel inédit, des extraits de répétitions et des titres en version "rough mix". Si le CD de démos ne propose pas grand-chose de neuf, la plupart des titres présentés ayant déjà été intégrés dans la version du premier album remasterisée en 2009 (le titre "Don't Take It Out On Me" étant, pour sa part, disponible depuis 1992 sur la compilation The Essential Michael Schenker Group, le sixième CD se fait plus intéressant puisqu'il permet de découvrir nombre de morceaux dans des versions préliminaires ou de travail, le plus souvent très avancées et s'éloignant finalement assez peu du rendu final, en tout cas dans l'esprit.

Forcément, l'écoute est un plaisir. L'écriture sur le premier album du MSG est aux petits oignons, et cette version remasterisée comble le manque de puissance que l'on peut ressentir aujourd'hui à l'écoute de l'album dans sa version originale. La production, signée Roger Glover, manquait alors un peu de profondeur, ce que corrige cette remasterisation. Le deuxième album est également un grand moment. Lors de sa conception, Michael Schenker est au plus bas mentalement, et le producteur Ron Nevison n'est pas au mieux non plus. Le groupe se rend à Montserrat pour enregistrer, et passe son temps à flâner plutôt que se mettre à la tâche. Les morceaux, précédemment composés par Schenker et Gary Barden dans un studio de répétitions à Londres, peinent ainsi à prendre forme lors de ces séances d'enregistrement qui s'apparentent à des vacances. L'album, porté par d'excellents titres tels que "On and On", "Looking For Love" ou "Attack of the Mad Axeman", reste néanmoins un essentiel dans la discographie de l'ange blond de la six cordes.

Tout se passe alors très vite. Michael Schenker et ses comparses enregistrent et publient l'album live One Night at Budokan, le nouveau chanteur Graham Bonnet se retrouvant à signer des exemplaires d'un album sur lequel il n'apparait pas. Le guitariste refuse de rejoindre le groupe d'Ozzy Osbourne, préférant se concentrer sur l'enregistrement du surprenant et intéressant Assault Attack, capté au Château d'Hérouville. Pour l'anecdote, Michael Schenker se rappelle avoir été marqué par les méthodes d'enregistrement assez peu orthodoxes du chanteur Graham Bonnet, qui préférait chanter sans pantalon, les bijoux de famille à l'air (afin, selon lui, de ne pas se sentir "contraint" au moment d'atteindre des notes aigues). En tout début de tournée, le nouveau chanteur s'éclipse (une histoire de parties à l'air, à nouveau) et Gary Barden effectue son retour, assurant la tournée et l'enregistrement de l'album Built to Destroy, un peu plus faible que ses trois prédécesseurs.

Voici donc pour ces petites histoires qui ont participé à construire la grande histoire d'un MICHAEL SCHENKER GROUP dont le début de carrière se voit ici mis en valeur par ces remasterisations de qualité et un packaging fourni (notamment un livret riche en photos et en interviews). Si les titres inédits sont finalement peu nombreux ou n'apportent pas de regard neuf sur ces quatre premiers albums, ils permettent d'offrir une vue complète sur ces années fructueuses et intenses, ici mises en valeur dans un coffret utile pour ceux qui souhaiteraient se rafraîchir la mémoire ou découvrir cette période faste dans la carrière du guitariste allemand.

3,5/5