Play Me Backwards avait confirmé le grand retour en forme de Joan Baez avec un album excellent en tout point. Cette réussite impliquait aussi que la suite ne devait pas décevoir et Joan préférera prendre son temps pour la faire. Dans une décennie qui voit un nouveau renouveau de la folk avec l'apparition de l'Americana, ce genre mélangeant folk, country, blues et rock apparu en réaction à la platitude de la country et du rock mainstream de l'époque, Joan y trouve un nouveau souffle. Et si depuis les années 70 nous connaissons son talent de songwriter, elle avoue qu'avec l'âge l'inspiration pour écrire vient à lui manquer et qu'elle préfère revenir au rôle d'interprète qu'elle assumait au début de sa carrière dans les années 60. Mais de la même manière qu'elle fit découvrir Bob DYLAN et Richard FARINA à l'époque, elle profite d'être entendue pour promouvoir de nouvelles voix folk, pop ou rock.

C'est entourée de ses deux producteurs de Play Me Backwards Kenny GREENBERG et Wally WILSON qu'elle reprend des morceaux de l'irlandaise Sinéad LOHAN et des américains Richard SINDELL et Dar WILLIAMS. 22 ans après ces noms ne sont peut-être pas rentrés dans le Panthéon de la Musique mais les morceaux sélectionnés ici démontrent un talent d'écriture indéniable ce qui permet d'aborder différents sujets. Des sujets politiques chers à Joan d'abord, comme l'immigration sur « Fishing » ou la pauvreté et l'abandon par les politiques sur la magnifique « Money for Floods », aussi des histoires d'amours malheureuses ou mélancoliques (« Reunion Hill », « Mercy Bound ») en dehors de la politique, mais surtout un sujet plus sensible que Joan n'avait jamais abordé auparavant, la pédophilie sur « Crack in the Mirror ».

La seule chanson sur laquelle elle est créditée est « Lily », un poème qu'elle a écrit et que Kenny Greenberg a ensuite mis en musique. Comme toujours elle ne déçoit pas pour l'interprétation et c'est entourée d'une pléthore de musiciens de studios émérites qu'elle permet à ces morceaux d'atteindre leur potentiel. Elle a trouvé depuis son disque précédent une manière d'adapter sa voix aux changements de l'âge et elle continue sur cette lancée, chantant avec l'assurance qu'apporte la maturité, mais tout en conservant sa pureté.

Gone From Danger est le 22ème album de Joan Baez, mais pas question pour elle de stagner. Elle signe ici un effort plus calme et sentimental que son précédent. Elle parvient une nouvelle fois à renouveler sa musique et sonne plus contemporaine que jamais.

Un petit mot pour finir sur la réédition de l'album. Sortie en 2009 sous le nom prétentieux de Collector's Edition elle rajoute un disque bonus comprenant un concert à Charleston en Virginie, USA. Entourée de Sidnéad LOHAN et de Dar WILLIAMS, le set vaut le coup d'oreille pour la reprise de Bob DYLAN « To Ramona » chantée en duo avec la chanteuse irlandaise.