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Joan BAEZ - Dark Chords On A Black Guitar (2003)
Par DERWIJES le 6 Février 2019          Consultée 1519 fois

Dark Chords on a Big Guitar, ou comment annoncer le programme dans le titre. Après avoir sorti un album par an pendant presque 20 ans, voilà que Joan BAEZ nous sèvre en espaçant ses sorties de presque six ans entre chaque. Nous l'avions quitté sur Gone from Danger à la fin des années 90 et voilà que nous nous retrouvons en 2003.

Nouveau siècle, nouvelle génération, même Joan. Comme nous tous notre Reine de la Folk ne rajeunit pas, mais peu de gens vieillissent aussi gracieusement qu'elle. Elle a atteint ce point dans sa carrière ou elle a cessé de courir après les modes pour imposer tranquillement son style. Au revoir donc les compositions personnelles, bonjour l'interprétation. Et cette nouvelle sélection de reprises se tourne plutôt vers des artistes de la Génération X comme Ryan ADAMS, Josh RITTER ou Gillian WELCH, une génération aux textes volontiers sombres ce qui explique le titre de l'album : du sombre partout mais avec une lueur d'espoir au bout du tunnel, symbolisé sur la pochette par le grand sourire de Joan.

Attention à la surprise à la première écoute, Dark Chords on a Big Guitar est plus rock que folk ! Les guitares acoustiques sont reléguées au second plan pendant que l'électrique vole la vedette. C'est que Joan a fait venir en studio les musiciens qui l'accompagnent d'habitude en tournée, parmi lesquels le guitariste Duke MCVINNIE qui sait se dépatouiller avec une six-cordes. Oh, et il y a aussi Gail Ann DORSEY, géniale bassiste de David BOWIE, parmi les chœurs ! Une présence trop discrète pour être remarquée, mais bon, c'est un nom que l'on retrouve toujours avec plaisir.

Cette utilisation proéminente de guitare électriques permet la création d'ambiance sombre et atmosphérique. Ce n'est pas le son poisseux de NINE INCH NAILS mais l'idée s'en approche : si Joan Baez n'a jamais eue peur de chanter des textes violents l'instrumentation restait soft. Mais tout en avançant dans ce nouveau son elle n'hésite pas non plus à regarder en arrière. L'influence Woody GUTHRIE se fait bien ressentir sur « Christmas in Washington ». Difficile de croire que ce morceau n'a pas été écrit pour elle tant elle chante avec conviction ! Durant les quelques minutes que dure le morceau on se retrouve face à la Joan Baez des années 60, celle qui galvanisait les foules avec son chant engagé et contestataire. Les temps changent, les musiciens vont et viennent mais l'injustice reste, et avec elle reste ceux qui comme la chanteuse s'y attaquent à bras le corps. Alors que le disque s'ouvre avec « Sleeper » un morceau rythmé et entraînant, rien ne présage un tel final, le genre de conclusion en beauté qui élève l'album à elle toute seule.

Il règne sur ce disque une ambiance pesante qui se dissipe rarement. A travers ces nuages de guitares perce la voix de Joan comme un rai de lumière. A la sortie du disque les journalistes s'exclamèrent avec surprise que sa voix avait changée ! Eh oui, qui eut crû qu'à soixante-trois ans (en 2003), notre organe vocal peut changer...Pour Joan le changement a commencé dans les années 90 et elle ne cesse depuis lors d'améliorer sa nouvelle technique. Fini l'époque où elle pouvait monter en puissance à chaque fin de vers, elle doit maintenant chercher de nouvelles manières de chanter, et cela se traduit par une manière plus poussée de se glisser dans la peau des personnages sur lesquels elle chante. Pour accompagner la mélopée lente et hypnotique de « Rosemary Moore » ou « Rexroth's Daughter » elle adopte un chant calme et langoureux, mais donne de sa personne pour suivre les lignes de guitare aussi vicieuses que le texte décrivant une attaque sexuelle sur « Caleb Meyer ». Et oui, évidemment, elle fait sienne chaque morceau qu'elle reprend. Ça en est presque du vol tellement elle parvient à magnifier les paroles des autres ! La preuve sur la sublime à pleurer « Motherland », pleine de spleen ou sur l'émouvante « In My Time of Need » de Ryan ADAMS, qui relègue l'originale loin, loin loin derrière.

Avec Dark Chords on a Big Guitar Joan Baez conclut sa trilogie que j'aime à qualifier « d'alternative ». Ce troisième album en décalage avec Play Me Backwards et Gone From Danger demande une écoute plus attentive que ses deux prédécesseurs pour s'apprécier à sa juste valeur, mais constitue une entrée de choix dans cette large discographie.

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- Joan Baez (chant, guitare, percussions)
- Duke Mcvinnie (guitare, basse)
- Byron Isaacs (basse)
- George Javori (batterie)
- Doug Pettibone (guitare)
- Rani Arbo, Gail Ann Dorsey (chœurs)


1. Sleeper
2. In My Time Of Need
3. Rosemary Moore
4. Caleb Meyer
5. Motherland
6. Wings
7. Rexroth's Daughter
8. Elvis Presley Blues
9. King's Highway
10. Christmas In Washington



             



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