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VARIÉTÉ INTERNATIONALE  |  B.O FILM/SERIE

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- Membre : Bande Originale De Film
- Style + Membre : John Barry , Michael Kamen & Orbital , David Arnold And Michael Price, Thomas Newman, Hans Zimmer

JAMES BOND - Skyfall (thomas Newman) (2012)
Par MARCO STIVELL le 3 Octobre 2021          Consultée 1241 fois

AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Il s'est fait attendre, mais pour la bonne cause ! Cinq ans après Quantum of Solace paraît Skyfall ; 2012 était l'année fatidique pour fêter dignement les 50 ans de la saga au cinéma (donc les presque 60 ans d'existence globale de James Bond), un degré d'existence pour le moins exceptionnel, sachant qu'il s'est fait en continu le plus souvent. Daniel Craig rempile naturellement et retrouve Sam Mendes, un réalisateur très en vue pour lequel il avait déjà travaillé dix ans plus tôt sur le film Les Sentiers de la Perdition avec Tom Hanks, Paul Newman, Jude Law également.

Skyfall est un chef-d'oeuvre du cinéma en général, à une époque qui semble mal trouver son équilibre entre le grand spectacle souvent bourrin plus qu'autre chose (Marvel compris), les films d'auteur, les comédies éphémères... Lui n'est musclé que par intermittence car, pour le reste, Mendes joue la carte finesse avec une grande précision et l'histoire concoctée par les scénaristes habituels n'en est que plus forte sur la longueur. Une fois de plus, Bond voit son personnage renversé (dès le départ, du haut d'un train sur un aqueduc) et mis à l'épreuve de lui-même, mais à travers son passé. On se laisse happer d'un bout à l'autre, même si de grandes libertés ont été prises.

Javier Bardem en Tiago Rodiguez alias 'Silva', méchant grotesque autant que flippant, théâtral et bissexuel, marque un retour aux vieux James Bond (confirmé dans le film suivant), tout simplement excellent. Une raison de plus d'adorer cet acteur après Almodovar, les frères Coen... Q et Moneypenny sont de retour, et bien de leur temps. Q (joué par Ben Wishaw) est un geek boutonneux (moins tête-à-claques que le Boris de GoldenEye en 1995) qui tend à être l'inverse de Desmond Llewelyn ou de John Cleese car soumis aux ordinateurs et plus jeune que Craig/Bond, pour lequel il tente à son tour d'avoir du répondant. Moneypenny (Naomie Harris qui s'est fait connaître dans une autre saga : Pirates des Caraïbes) est métis pour la première fois. Toutefois, ces deux personnages ayant connu leur importance avant tout grâce au cinéma (Q en particulier), les évolutions peuvent se faire avec moins d'impact, d'autant que Moneypenny, agent comme Bond au début du film, garde bien son identité pour la fin. Et sans rien enlever aux gloires passées.

La féminité a des présences diverses : en dehors de Moneypenny par 'sursauts', Bérénice Marlohe est la seule véritable marque de tradition pour le peu qu'elle apparaît, plutôt classe malgré un jeu légèrement trop français durant la scène en tête à tête au bar à Macao. Dans Skyfall, et ce qui fait aussi sa grandeur, la James Bond Girl est en réalité M, patronne du MI6, de Bond donc. Judi Dench fut une surprise de taille lorsqu'elle avait repris le rôle en 1995 pour GoldenEye, et là elle tire le rideau avec panache, en poésie également : le discours et la poésie d'Alfred Tennyson lors de la commission d'enquête et face à la ministre, doublée par une scène d'action folle, c'est du génie. Pour une fois, James Bond frôle le lyrisme et le côté militant n'est pas social ni écologique (ce dernier mot sonnait même faux en 2008 dans Quantum of Solace !), c'est une défense humaine très chevaleresque face aux technologies et à ceux qui en font ce qu'ils en veulent. J'adhère totalement ! Tout comme le fait que le grand Ralph Fiennes, qui vient juste de finir de jouer Lord Voldemort dans la saga Harry Potter, rebondit à merveille ici en passant de Mallory, soi-disant bureaucrate, à la reprise du rôle de 'M'. Magnifique, jubilatoire et très beau retour à la belle époque avec Bernard Lee !

En dehors de quelques scènes exotiques fidèles et à l'esthétique réussie (Macao, la scène des glaces de l'immeuble à Shanghai, quelle photographie, nom de Bleu !), ce James Bond-là ne pouvait être que très anglais, ou britannique plus largement. On l'adore pour cela, depuis la statuette de chien affreuse de Judi Dench/M aux couleurs de l'Union Jack, en passant par le retour de l'Aston Martin (avec des missiles !), les multiples vues de Londres (rues, métro, toits), et bien sûr le bouquet final en Ecosse des plus grandioses, véritable western crépusculaire et explosif. Malgré d'ailleurs le choix convaincant d'acteur pour le garde-chasse Kincade, à savoir l'Anglais Albert Finney qui est une ancienne star du cinéma ayant tourné plus récemment avec Tim Burton et dont Skyfall est l'ultime rôle (il décède en 2019), on regrette de ne pas avoir eu droit à Sean Connery, digne représentant de l'Ecosse, premier 'vrai' James Bond sur écran et qui a tant aidé au succès de la saga, dont ç'aurait pu être aussi le splendide final de carrière, bouclant la boucle de façon prodigieuse.

Grâce à Connery, Ian Fleming s'était réconcilié tardivement avec sa patrie au chardon, elle le mettait si mal à l'aise dans son enfance, lui le citadin dans l'âme ! Dans le film et au milieu d'un havre de paix, Craig/Bond dit de la maison de ses parents : J'ai toujours détesté cette baraque !. Certes, Andrew et Monique Bond sont censés être morts à l'origine dans un accident de voiture, ils n'ont pas été assassinés comme on nous le dit là, mais le prénom de la maman respecte bien la volonté de Fleming qui se souvenait en écrivant alors de l'une de ses anciennes compagnes, une haute-savoyarde. Par bribes, ce film des 50 années de James Bond rend un hommage formidable à 'papa' Fleming, issu d'une famille déchue de sa réussite sociale, qui a couru après l'action et le succès toute sa vie, inventant la première pour créer un mythe et ne pouvant profiter du pactole mérité que sur deux ans, avant de décéder en 1964. S'il avait su que le plus gros jackpot – plus d'un milliard d'entrées !! - était prévu pour 2012, en sus de tout ce qui a été accompli depuis cinquante ans...

Un autre qui ne pouvait voir Skyfall, c'était John BARRY, parti en 2011. J'aurais été très curieux de connaître son avis sur la partition du film, lui qui avait été si enthousiaste concernant le travail de David ARNOLD, son successeur attitré. Car si ce film-anniversaire est un chef-d'oeuvre par pratiquement tous ses aspects, visuel et photographique, au niveau des dialogues comme du rythme (gommant avec brio les erreurs de Quantum of Solace lors des scènes les plus musclées), je dois néanmoins reconnaître avoir été déçu par la musique, fortement même, au moment d'y prêter une plus grande attention. Thomas NEWMAN était un choix des plus prometteurs, on pouvait espérer beaucoup du talent qui a laissé sa marque au cinéma avec des oeuvres aussi diverses que L'Homme Qui Murmurait à l'Oreille des Chevaux de Robert Redford (1998) ou Le Monde de Nemo (film Pixar, 2004), sans oublier ses collaborations passées - et futures - avec Sam Mendes le maître d'oeuvre de Skyfall, (American Beauty en 1999, Les Sentiers de la Perdition en 2002, etc.

Quand je vois certaines personnes clamer que (pour eux, certes), c'est la meilleure B.O de James Bond, je ne peux m'empêcher d'être perplexe. Tous les goûts etc oui je sais ! Et oui, mettre ADELE en exergue, puisqu'elle porte la chanson soul/pop internationale comme Amy WINEHOUSE ne peut plus le faire, en termes de voix et d'univers comme d'identité, c'était parfaitement logique. Surtout qu'avec "Skyfall", écrite par elle-même avec son producteur Paul Epworth et habillée musicalement par J. A. C. Redford (Thomas NEWMAN n'y est donc pour rien !), on revient avec bonheur aux 'slows' classiques tels qu'on les avait laissés en 1997 avec Tomorrow Never Dies/Demain Ne Meurt Jamais, ballades féminines à la fois noires, sensuelles... En un mot, puissantes !

Sur le plan composition, c'est une réussite, à la hauteur des meilleures passées. Quant au chant, même si le timbre d'ADELE a tout pour plaire, je ne suis pas entièrement convaincu, notamment par le grain, la production. On rentre dans les années 2010 avec tout ce qu'elles comportent de factice et superflu, même sur les vocalistes qui en ont le moins besoin (et au-delà de 2020, il semble hélas que ce ne soit pas terminé !). La chanson se classe parmi les singles les plus vendus de tous les temps, mais à 7,5 copies, cela reste loin de son propre et futur "Hello", à ADELE, et encore trop peu par rapport à d'autres hits de la décennie qui méritaient beaucoup moins leur succès. Et une nouvelle fois, hors de question de placer cet ensemble loin au-dessus des Shirley BASSEY, Nancy SINATRA, LULU, Carly SIMON, Sheena EASTON etc, pour ne parler que des femmes qui ont chanté James Bond au générique (Daniel Kleinman le designer a repris son poste, ouf !). Tout comme Skyfall, le film masterpiece n'est pas à mettre sur un piédestal si c'est pour occulter ou laisser loin derrière les films avec Connery, Lazenby, Moore, Dalton, Brosnan et Craig lui-même !

Même si Thomas NEWMAN est étranger à la chanson-titre (qui n'est pas sur le CD), il en reprend des bribes sur "Komodo Dragon", la deuxième séquence chinoise, un des meilleurs instrumentaux de l'ensemble avec sa petite variation aux cordes du plus bel effet, tout comme ses samples qui évoquent les sons extrême-orientaux, les anklungs (Macao communique par la mer directement avec les Philippines, l'Indonésie). Si le compositeur a choisi de garder le mélange orchestral et électro de ARNOLD, il se limite pas mal au niveau exotisme, même si les premières notes du CD de la B.O nous plongent dans la chaleur turque comme il se doit avec "Grand Bazaar, Istanbul".

Les deux premiers accords staccato de cuivres 007 traditionnels nous mettent direct dans le vif du sujet au début du film avec l'apparition surprise de Craig (pour la deuxième fois, le gunbarrel est relégué à la toute fin, quand les gens se lèvent pour partir !). Juste après, une musique électro planante monte doucement dans l'entrelacs de cordes, puis les danses orientales s'installent pour quelques temps, au gré de l'action très forte en introduction. Cela ne veut pas dire inspiration toujours au rendez-vous ! NEWMAN, contrairement à ARNOLD, préfère les suites courtes, cinq minutes maximum. Et pourtant, ces cinq premières minutes-là arrivent à paraître déjà longues !

"New Digs", "Brave New World" et d'autres thèmes vont chercher dans la musique orientale avec une grande part de percussions. NEWMAN lâche ses tambours à foison, mais le caractère tribal mélangé à de l'électro se révèle nettement moins réussi qu'à l'époque d'ARNOLD. La diversification fait défaut, de même qu'une trop grande proximité entre les thèmes alors que les séquences se passent dans deux lieux très différents : la course-poursuite entre Craig/Bond et Bardem/Silva dans les rues de Londres et le métro se trouve particulièrement minée par ce systématisme. Mince quoi, Dench/M est en train de citer Tennyson et de nous faire frissonner ! On peut noter certes les effets 'thrash' subsistant sur "The Bloody Shot", les bonnes allées et venues de l'orchestre sur "Quartermaster", le moment où Wishaw/Q tente de diriger Craig/Bond, mais c'est bien peu. Les échos/feedbacks de guitare électrique sur le très court "Silhouette" et ailleurs ne changent rien à un ensemble bien trop mastoc et bavard pour convaincre.

D'accord, le fait de voyager n'est pas un prétexte pour s'acclimater toujours à l'ambiance où l'on se trouve, avec des instruments caractéristiques. Tout de même, cet ambient grisant à Shanghai en voiture 'by night', ce "Jellyfish" glaçant en haut de l'immeuble, que d'aucuns rapprochent du Batman the Dark Knight de Christopher Nolan, ne manquent-ils pas de corps, à défaut d'identité ? Le genre B.O des années 2010 comme la décennie précédente a ses poncifs que NEWMAN n'a pas su éviter. Il y a de quoi souffrir particulièrement en revenant hors-film sur la partie Ecosse en musique. "Welcome to Scotland", really? Malgré sa belle tension crescendo, "The Moors" n'est pas vraiment l'idée que je me fais des Highlands si je tiens à m'en souvenir, même sans harpe ou cornemuse. Et passées les premières minutes de mise en place de l'action, la partition sombre vers le commun, qu'elle soit pulsée ou ambient (la suite "Deep Water" encore trop longue).

En réalité, c'est un peu le comble de se dire que les rares citations du "James Bond Theme" forment l'ossature mélodique la plus originale et agréable à (ré)entendre, même dans son plus simple apparat cinquantenaire : "Breadcrumbs" ou Aston Martin le retour, "Day Wasted" avec sa guitare western restée en place depuis 2008... NEWMAN a eu le mérite de s'écarter de 007 pour écrire le thème original du générique de fin, mais "Adrenaline" sent bon le passe-partout.

Tout n'est pas noir, mais les bons thèmes mélodiques complets, souvent courts, se comptent sur les doigts d'une main : "Someone Usually Dies", "Mother" et ses cuivres solennels, "Enjoying Death" qui paraît hors du temps, le rêveur et exquis "Severine". Et aussi "Cool Shave", avec sa flûte sur le fil du rasoir, c'est bien le cas de le dire ! On note enfin avec Skyfall que pour la première fois, la tracklist du CD ne suit pas le déroulement du film. Aucune importance en fait, un menu détail pour quelque chose de grand !

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À Macao, dans un nightclub sélect :
« Vous savez, dit Bond à Severine, que votre sourire est niais ? Trop forcé ?
-... »

En Ecosse, durant l'entraînement au fusil :
« Espèce de sale petit merdeux qui pète plus haut que son c... ! lança Kincade.
-...
-Et arrête de sourire avec tes dents comme ça, c'est pas pour toi ! Tu sais qu'on dirait Schwarzenegger dans la scène coupée de Terminator 2 ?
-Pardon, reconnut Bond, je repensais à une fille que j'ai connue à Macao. Elle n'a pas fait long feu, la pauvre...
-Tu sais ce qu'on dit ici, fiston, les femmes ça n'a qu'un temps court, mais fais toujours en sorte que ta mèche soit longue !
-Prenez garde Kincade, on est en 2012 et déjà qu'il n'y a plus trop de demoiselles nues au générique...
-Ouais bah, ici il n'y en a pas du tout ! Au fait, dis un peu : ta patronne, elle est célibataire ? »

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   MARCO STIVELL

 
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- Thomas Newman (compositions, orchestrations)
- Adele (chant, écriture)
- Paul Epworth (composition, production)
- J. A. C. Redford (orchestrations)


1. Grand Bazaar, Istanbul
2. Voluntary Retirement
3. New Digs
4. Severine
5. Brave New World
6. Shanghai Drive
7. Jellyfish
8. Silhouette
9. Modigliani
10. Day Wasted
11. Quartermaster
12. Someone Usually Dies
13. Komodo Dragon
14. The Bloody Shot
15. Enjoying Death
16. The Chimera
17. Close Shave
18. Health & Safety
19. Granborough Road
20. Tennyson
21. Enquiry
22. Breadcrumbs
23. Skyfall
24. Kill Them First
25. Welcome To Scotland
26. She's Mine
27. The Moors
28. Deep Water
29. Mother
30. Adrenaline



             



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