Ce second volume de On The Groove Train est beaucoup plus intéressant que le premier. Deux tiers des morceaux qu’il contient sont issus de 45-tours rares, que ce soient des singles isolés ou des versions maxi-single. Commençons par élaguer ce qu’il faut élaguer : nous n’avons que faire des versions single de ces chansons de GIORGIO & CHRIS, Janis IAN ou Madleen KANE; encore une fois, mieux aurait valu publier les albums entiers, quitte à mettre les mixes single en pistes bonus.

Nous assistons aux premiers pas de plusieurs des chanteuses produites par Giorgio MORODER et Pete Bellotte : Roberta KELLY avec "Kung Fu’s Back Again" (1974), Chris BENNETT avec "Disco Man" / "This Perfect Day" (1976), le groupe SMILEY et la chanteuse de passage Karen TAYLOR avec "Doctor Funk" / "Funk You Very Much" (1976), de même que le premier 45-tours du combo SPEED LIMIT (projet de Charly Kressmann), "Bump The Twist" / "The Disco Twist" (1976).
Nous avons également droit aux deux premiers singles de Donna SUMMER, dans la lignée de ses débuts marqués par la variété internationale (son premier album Lady Of The Night et la seconde face de Love To Love You Baby). Malgré la dilution du chant soul dans le moule de la variété, les quatre chansons sont, selon moi, légèrement supérieures au niveau global à Lady Of The Night. "Denver Dream" est porté par la belle synergie des guitares et des violons, l’optimiste "Virgin Mary" par les cordes suaves et le piano clinquant, seul "Something’s In The Wind" s’avérant plus faible.

Pete Bellotte a même tenté une amorce de carrière solo, avec un single sorti en 1974 sous le pseudonyme Tracey Dean, contenant deux chansons bien rythmées, telles que Giorgio MORODER en faisait pour l’album Son Of My Father (1972) et quelques singles auxiliaires. Pete Bellotte y module davantage sa voix que son collègue. Les instrumentations de ces deux chansons "Moonshiner" et "Boy On The Ball" sont également plus conventionnelles, sans synthétiseurs, orchestre ni percussions proéminentes.
Plus étonnant, il nous est donné à découvrir un single de Giorgio MORODER en solo sous le faux-nez The Beepers; derrière une pochette particulièrement laide, nous trouvons deux morceaux électroniques à vocoder, évoquant From Here To Eternity (1977) et "Chase" (1978) mais s’en éloignant de par un aspect plus cheap et un usage primaire de la batterie. "Love Is You" et "Love Trap" sont des mid-tempo ternaires; le premier est nonchalant et le second plus légèrement chaloupé, les deux sont très linéaires et anecdotiques. Pas de quoi se relever la nuit.

Le single de SPEED LIMIT est sans grand intérêt, trop banal et édulcoré, et qui plus est les deux chansons sont presque identiques. Le reste est meilleur. D’un côté, les singles de 1974-75; à défaut de mélodies inoubliables, nous avons la pop de "Moonshiner" et "Boy On The Ball" mais aussi les cordes et l’interaction vocale de "Kung Fu’s Back Again" (la chanson et la version semi-instrumentale à la guitare, malheureusement mal balancées, la première étant ici mixée plus fort que la seconde) préfigurant déjà le Disco, et les quatre chansons de Donna SUMMER. De l’autre, des morceaux nettement plus typés Disco tels que "Doctor Funk" (et sa version allégée "Funk You Very Much") de Smiley, et le très bon "Disco Man" de Chris Bennett (dommage que la ballade "This Perfect Day" ne soit pas à la hauteur). Le single de The Beepers est un cas à part.
Plus loin, nous trouvons une reprise de "Love Now, Hurt Later" (Love Is You, Love Is Me, 1978), publiée la même année mais recueillie en album (Love Dance) deux ans plus tard. Une interprétation enrichie de cuivres absents de la version originelle, par ailleurs assez fidèle à la version d’origine (notamment au niveau du chant) quoiqu’un peu cheap. Pas mal mais anecdotique et un tantinet monolithique.

Passons maintenant en revue les morceaux des années 1980, les années Pop FM pour Giorgio MORODER. Cette période est ici surtout représentée par des remixes maxi-single de morceaux de chanteurs produits par Giorgio MORODER. Ainsi, nous trouvons les versions longues de "Shannon’s Eyes" de Paul Engemann (Innovisions, 1985), "The Runner" de Richard T. BEAR (The Runner, 1986), et "Thief Of Hearts", single isolé (1984) de Melissa MANCHESTER dont on retrouve également la version originale sur cette compilation. Si "Shannon’s Eyes" est la seule des trois à figurer sur un album solo de Giorgio MORODER, les deux autres sont parfaitement dans le ton et, en fin de compte, peu de choses différencient des albums comme Solitary Men et Innovisions d’albums solo d’autres chanteurs produits par Giorgio MORODER vers ces années-là.

Cependant, il reste encore un "Giorgio Moroder Medley" et un remix de "Space Warriors" (1979), cumulant vingt-deux minutes et figurant sur le disque Disco Circus 1983 - Program 2 (dont la pochette pompe honteusement celle du Star Peace de DROIDS), un recueil de remixes par le producteur Peter Slaghuis alias Blue-Eyed DJ. Pour ce qui est du medley, la part belle est évidemment faite à From Here To Eternity (1977), "Chase" (1978) et E = MC² (1979), mais on trouve également "On The Radio" (1980) de Donna SUMMER et, hélas, "Classically Elise" (1977) de Dino SOLERA, qui détonne totalement au milieu du reste. Le tout est lié par une rythmique ultra répétitive, ne variant quasiment pas de bout en bout de ce long medley. Divertissant mais sans grand intérêt intrinsèque. Le remix de "Space Warriors", l’un des quelques bons morceaux du moyen Body Shine (1979), confère de la consistance rythmique qui manquait à l’originale. On peut y entendre le pleurage caractéristique du vinyle.

Il reste les défauts structurels de la compilation. Outre la redondance des chansons déjà connues, il se trouve que les chansons sont bazardées dans un très vague ordre chronologique. Certaines paires de chansons d’un même single sont même séparées, ce qui n’était quasiment pas arrivé sur les deux volumes de Schlagermoroder. Peut-être Repertoire Records ont-ils voulu éviter la redondances de certains singles contenant deux morceaux trop proches ou deux versions d’une même composition (ceux de SMILEY, Tracey Dean, SPEED LIMIT et The Beepers), mais pour le sérieux de la démarche d’archivage, on repassera. L’absence des autres singles de SMILEY et SPEED LIMIT est également regrettable.

Ne faisons pas la fine bouche, nous découvrons de très beaux restes du binôme Giorgio MORODER et Pete Bellotte ainsi que de certaines de leurs plus emblématiques chanteuses. Une compilation à découvrir. Cependant, se munir de préférence d’une playlist iTunes ou VLC.