Ce "Fils De Mon Père" ne paye pas de mine, et pourtant il s’agit du premier jalon de la discographie de Giorgio MORODER. C’est aussi l’album qui scelle sa collaboration des plus fructueuses avec le producteur Pete Bellotte.

Bien que ce soit un album de pop 100 % pur jus (satisfait ou remboursé!), Son Of My Father est largement supérieur à son prédécesseur That’s Bubblegum (1969).
D’une part, contrairement au premier album, tous les morceaux sont des originaux, la plupart co-écrits par Pete Bellotte – le morceau "Tears" est co-signé par Heinz Bothe-Pelzer qui fait son unique apparition auprès de Giorgio.
D’autre part, les instrumentations et le son d’ensemble sont beaucoup plus consistants qu’auparavant. Giorgio MORODER utilise le synthétiseur Moog sur plusieurs morceaux, surtout sur la première face, après la concluante expérience "Arizona Man" (1970). L’utilisation du Moog manque ici encore de finesse, mais apporte déjà une valeur ajoutée à l’album. Pour le reste, si les instrumentations ne s’éloignent guère beaucoup des canons de la pop seventies – chœurs sur le refrain, guitares saturées, piano – elles sont dynamisées de belle manière par les percussions énergiques de Keith Forsey, musicien de studio très prolifique. "Underdog" et "Tears" voient également la participation d’un ensemble de cordes non crédité.

Les compositions se trouvent dans la continuité de ce que Giorgio MORODER a déjà accompli, en album ou en singles, et ne dérogent pas à la structure couplet-refrain, à l’exception de l’instrumental "Tears" qui fait monter un unique thème bref en crescendo, et du pop baroque "Underdog", excellent festival de cordes, synthés, percussions et guitares noisy. Ouvrant la seconde face, "Lord Release Me", le numéro gospel de service, fait son effet. Outre "Underdog", "London Traffic" et "Spanish Disaster" bénéficient des percussions. Même la petite ballade "Pauline" n’est pas désagréable, pourtant ce registre est le véritable serpent de mer de la pop.

Son Of My Father existe en deux versions, avec des pochettes distinctes et un ordre des chansons différent. L’édition CD de 2013 est tout indiquée puisqu’elle recèle de nombreuses faces B et versions alternatives de la même époque – moins profuses qu’auparavant, c’est pour ça que j’en parle ici et pas dans la chronique précédente. On peut se passer allègrement des versions mono de "Watch Your Step", "Son Of My Father" et "Underdog". Éventuellement, on peut s’amuser avec les versions en italien de ces deux dernier morceaux et la version instrumentale de "Son Of My Father" où le chant est remplacé par une ligne de Clavinet.

Sans surprise, ce sont les faces B qui font la légitimité de cette réédition. "Today’s A Tomorrow" et "Take It, Shake It, Break My Heart" se situent dans la lignée de la facette rock de l’album. "Everybody Join Hands" et "I’m Free Now" sont de nouveaux pastiches de gospel, ce dernier écrit par les cadors italiens Fausto Leali et Luciana Medini pour Giorgio MORODER.

Un 45-tours inédit de 1972 qui contient "The Future Is Past" et "Blue Jean Girl" figure sur la compilation Schlagenmoroder Volume 1: 1966 - 1975 (2013). "The Future Is Past" est plombé par un refrain vaseux pour un résultat lourdingue, et les cordes n’arrangent rien. Même combat pour "Blue Jean Girl", le synthé est ici déplacé et le refrain horrible de niaiserie. Heureusement, ces deux déchets ont été écartés de la réédition de Son Of My Father.

Voilà un bon petit album de pop music où rien n’est à jeter. Pas de quoi sauter au plafond (attention la tête) non plus.