Michael Schenker n'est pas homme à aimer la lumière et à se mettre en avant trop, trop longtemps, sous le feu des projecteurs. Bien sûr, le Mad Axeman aime se produire en live et transmettre sa musique face à un public, mais il reste à cette occasion discret, peu communicatif, et plutôt réservé, à l'inverse de son frère Rudolf, qui parcourt plusieurs kilomètres lors de chaque concert avec les Scorpions. Est-ce pour cette raison que la vidéographie du MSG est si chiche ? Si quelques concerts évènements ont fait l'objet d'une sortie en vidéo (le commémoratif Michael Schenker Story Live en 1997 et le concert-anniversaire des 30 ans du MSG en 2010), peu de vidéos approuvées par le guitariste ont atterri dans les bacs. Ce Live in Europe a donc des allures de sortie à se procurer sans hésiter, car rare, et surtout digne d'intérêt. En effet, depuis 2010, beaucoup de choses ont changé (voici qui n'est pas surprenant pour qui suit la carrière du blond germain) : le MSG en pause forcée (même si Schenker n'exclut pas de composer un nouvel album avec Gary Barden à l'avenir), le guitariste a décidé, depuis le début de cette nouvelle décennie, de se consacrer à « l'entité » Michael Schenker plusqu'au MSG, qui n'est finalement qu'un de ses nombreux projets. Un nouvel album sous le bras, le guitariste s'embarque donc en 2011 pour une tournée, avec différents line-up selon les pays et les continents visités : Michael s'acoquine avec le chanteur Michael Voss, producteur et chanteur principal sur l'album Temple Of Rock, pour le Japon ; Robin MacAuley prend le relais pour la tournée américaine, qui voit Michael interpréter plusieurs extraits des albums sortis entre 1987 et 1993 par le MSG alors rebaptisé MacAuley/Schenker Group. Enfin, l'Europe a droit pour sa part à un line-up qui fera frémir les fans de Scorpions puisque, outre le guitariste/claviériste Wayne Findlay et le chanteur Doogie White, le line-up intègre le bassiste Francis Buchholz et le batteur Herman Rarebell, deux ex-Scorpions (ils ont fait partie du line-up « historique » du groupe) et pour beaucoup la meilleure section rythmique des arachnides. Ce Live In Europe vient donc à point nommer nous rappeler que, quelques soient les projets auxquels il a pu prendre part, Michael Schenker reste un shredder, un rocker, un bluesman, en bref un guitariste hors paire.

Ce DVD, capté dans la ville hollandaise de Tilburg devant un public de quadras et de quinquas bienveillants mais peu expressifs, met donc à l'honneur l'ensemble des groupes dans lesquels Michael a joué, n'en déplaise au logo MSG présent en filigrane sur la jaquette. On y retrouve du MSG bien sûr, mais aussi du UFO et du Scorpions. Après un court speech introductif (narré par William Shatner!), les musiciens déboulent au son de l'instrumental « Into The Arena ». Immédiatement, Michael surprend par son sourire radieux et son envie d'en découdre, adoptant des postures (guitare levée lors du solo, photo du public à la fin de « Rock bottom ») et faisant participer le public avant que Doogie White n'entre en scène pour le premier titre chanté, « Armed and Ready ». Tout naturellement, les titres du MSG interprétés sont issus uniquement des deux premiers albums du groupe, mythiques car contenant notamment « Cry for the nations », « Let sleeping dogs lie » et « On and On » interprétés lors du concert. Si deux titres de Temple of Rock figurent sur la setlist (« Hanging on », interprété par Michael Voss, œuvrant cette fois en invité, et l'excellent « Before the devil knows you're dead »), Michael surprend en sortant de sa besace bon nombre de titres tirés de Lovedrive, un album des Scorpions paru 1979 et sur lequel il a enregistré quatre morceaux, tous interprétés lors du show : outre « Another piece of meat », régulièrement interprétée par le MSG au début des années 2000, le Mad Axeman dégaine donc un « Lovedrive » débordant d'énergie, « Coast to coast », instrumental tout en mélodie, moins dans l'énergie brute que « Into the Arena », et la célèbre ballade « Holiday » sur laquelle un Doogie White pourtant en voix peine à faire participer le public. Étrangement, il faudra attendre « Rock you like a hurricane » pour que celui-ci se réveille enfin. Une véritable surprise que l'interprétation de ce morceau de Scorpions, puisque Michael n'a pas collaboré à son écriture ou à son enregistrement. Celui-ci, tout comme « Blackout » joué lors des rappel, est surtout prétexte à mettre en valeur les ex-Scorpions Herman Rarebell et Francis Buchholz, qui rayonnent. Le second, grand dadais le sourire vissé aux lèvres, le premier toujours fringuant malgré ses 62 printemps, prennent plaisir à faire participer le public sur cette interprétation pleine d'énergie, presque meilleure que celle des Scorpions actuels. A noter que c'est Wayne Findlay, avec ses faux airs de Dimebag Darrell, qui prend en charge les soli principaux sur ces deux morceaux. Et c'est toujours lui qui, de notes délicates jouées au clavier, introduit le deuxième grand moment de folie de ce concert qu'est « Doctor, doctor », classique immortel de UFO qui voit le groupe et son public s'unir dans un défoulement général jouissif. Si l'on peut regretter la présence de certains titres de UFO, somme toute dispensables, dans la setlist (tels que « Lights out » ou « Shoot shoot »), force est de reconnaître qu'un concert de Michael Schenker sans ce titre serait comme une mie sans son pain : impensable ! Le son, impeccable, et l'image, plus que correcte (de nombreux plans larges, filmés par derrière la scène ou s'attardant longuement sur les musiciens permettent de s'y croire vraiment) font de ce concert à Tilburg un excellent témoignage des capacités actuelles d'un Michael Schenker sauvé par la sobriété.

Les bonus valent également leur pesant de cacahuètes, puisque l'on trouve en complément cinq morceaux issus de la prestation du groupe donné au High Voltage Festival en juillet 2011. Avec cette fois-ci Michael Voss au chant et Elliott Rubinson à la basse, Michael propose quelques titres déjà présents sur le concert de Tilburg. Mais l'intérêt réside dans les nombreux invités qui envahissent la scène sur « Rock you like a hurricane » (Rudolf Schenker) puis sur « Doctor doctor » (le-ex UFO Pete Way et les chanteurs Jeff Scott Soto et Doogie White), pour nous offrir un moment de hard rock dantesque et une véritable célébration de la musique du blond germain. Enfin, le DVD présente une courte séquence « backstage » filmée avant le show de Tilburg, qui permet d'entrer quelques instants dans l'intimité du virtuose. Tant et si bien que tout cela constitue l'un des témoignages vidéo les plus complets et les plus réussis de Michael Schenker, et un moment de bonheur intense pour les amateurs de MSG, Scorpions et UFO et de leur dénominateur commun, un quinquagénaire blond au caractère difficile, qui brille encore de mille feux !

Note : Cette sortie est disponible en trois formats : un DVD simple, un double album, ou un combo blu-ray qui offre le concert et sa bande-son.