Comment est né Alice COOPER ? Comment Vincent FURNIER, son véritable nom, en est-il arrivé à adopter ce nom féminin ?
La légende, démentie par l’intéressé, veut qu’à l'occasion d’une séance de spiritisme le fantôme d’une sorcière aurait recommandé l’utilisation de son propre nom : Alice COOPER. Si l’origine de ce nom reste controversée, celui-ci est dans un premier temps, tout autant le nom du groupe dans lequel Vincent FURNIER officie en tant que chanteur, que le nom de scène que celui-ci adopte alors. Toujours est-il que l’histoire du groupe débute réellement en 1968, lorsqu’à la suite d’une série de concerts dans des bars et des établissements de nuit, ils se font repérer par Monsieur Frank ZAPPA en personne qui les signe sur son propre label et les incite à enregistrer leur premier album.

Le résultat fleurte encore avec l’amateurisme. Il faut dire que l'album a été réalisé en une semaine et dans des conditions assez particulières. Le groupe pensait qu’il entrait en studio pour enregistrer une simple démo qui ne donnerait naissance à un réel album que plus tard, lorsqu’il apprend de la bouche de ZAPPA, alors derrière la console, qu’il n’y aurait pas de nouvelles prise mais qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter et que les éventuelles "erreurs" seraient corrigées au mixage.
Lorsque le groupe découvre le résultat final, il est peu de dire que la déception est immense.
Et ce ne fut que le début d’une série d’incompréhensions entre le groupe et leur mentor. Ainsi, la pochette résulte d’un choix personnel de ZAPPA. Celui-ci, ayant perdu le visuel choisi par le groupe, décida d’utiliser comme pochette d’album une des 2 peintures qu’il venait d’acheter au peintre Ed Beardsley. Accessoirement, le titre de ce tableau, Pretties For You devint celui de l’album !
Pour la petite histoire, le second tableau acheté fut utilisé pour la pochette d’un disque des MOTHERS OF INVENTION, et « Pretties For You » termina sur le mur du living room de ZAPPA.

On comprend que les relations entre le jeune groupe et ce dernier n’étaient pas idylliques, d’autant plus que leurs objectifs artistiques étaient diamétralement opposés. Alors que le groupe souhaitait adopter une démarche résolument commerciale, ZAPPA n’eut de cesse de les pousser dans une direction plus second degré et plus décalée. Cette orientation "arty" trouve toute son expression dans des titres de la trempe de "Today Mueller" qui évoque une des premières fans du groupe et comporte des parties instrumentales des plus étranges.
Quoi qu'il en soit, l’ensemble sonne brouillon, et le groupe fait preuve d'un manque de cohésion et de maitrise instrumentale évident. Les mélodies sonnent souvent faux et l’interprétation n’est pas exempte d’approximation. Même les arguments de la recherche d'expérimentation et d'un esprit psychédélique ne parviennent pas à masquer la pauvreté de l’ensemble. La voix de Vincent FURNIER n’a rien à voir avec le timbre rauque et inquiétant qui fera sa gloire quelques années plus tard. Les vocaux sont fades et passe-partout.

Peu de choses donc à sauver de ce court album qui s’apparente bien plus à la démo d’un groupe encore en quête d'une direction musicale qu’à un véritable premier album. Tout au plus peut-on remarquer une version embryonnaire du tube "Elected" au travers de "Reflected". La seule chose qui évite au groupe de sombrer dans le plus profond anonymat est sa tendance à aborder une imagerie provocante et décalée notamment au travers de costumes et de postures volontairement outrageuses pour l’époque.

Sans surprise, ce Pretties For You ne rencontra aucun succès et n’a d’autre valeur qu’historique. Il faudra attendre encore un peu avant de pouvoir s’émerveiller devant le talent du groupe et de son increvable leader.