Après environ trente années de carrière, avec le ALICE COOPER BAND, puis en tant qu’artiste solo, Vincent Furnier nous fait le coup du raclage de tiroirs. Il en résulte un coffret bien touffu qui regroupe plus de quatre-vingts morceaux dont un bon nombre d’inédits ou de versions inédites de titres déjà connus.
Soyons clair, ce bel objet ne s’adresse qu’aux fans. Les amateurs occasionnels, et à plus forte raison les néophytes, risquent d’être déboussolés de ne pas trouver leur compte dans ce pavé massif. Ces derniers auraient plutôt intérêt à se procurer Alice Cooper's Greatest Hits (1974) ou bien le live Raise The Dead : Live From Waken (2014). Les passionnés découvriront, eux, une multitude de titres plus ou moins inédits et surtout, soyons honnêtes, plus ou moins intéressants.

Le premier des quatre disques couvre la période pré-succès d’ALICE COOPER, à savoir l’époque où Vincent Furnier faisait partie du groupe The Spider, et celle des débuts du ALICE COOPER BAND. Il n’y a pas réellement de quoi s’extasier sur les titres de la période The Spider, "Don't Blow Your Mind" et "Hitch Hike" (un standard de Marvin GAYE déjà repris avec plus de bonheur par les ROLLING STONES et The MOTHERS OF INVENTION) étant sans grand intérêt. "Nobody Likes Me", et ses vocaux typés à la fois Cabaret et Hippies, présente lui une facette assez surprenante du groupe qui n’est pas sans préfigurer certains des délires du maître à la fin des années 70.

Le deuxième disque aborde la première grande période du bonhomme. Il nous propose principalement deux raretés réellement intéressantes. Tout d’abord, un OVNI Rockabilly "Slick Black Limousine", transcendé par une guitare extraterrestre et par un changement de rythme/ambiance réellement jouissif. Ensuite, "I Am Flash" (semble-t-il la B.O d’un nanard de l’époque) surprend par son aspect rugueux et primaire. Pour le reste, des standards du groupe et quelques petites surprises sans grand intérêt comme cette version originale de "Muscle of Love" appelée "Respect For The Sleepers".

Le troisième disque aborde la période la plus controversée d’ALICE COOPER, celle où il alterna expérimentations géniales et remplissage à la limite du ridicule. Sans surprise, on constate que le meilleur de cette époque se trouve déjà sur les albums studios (qu’il peinait parfois à clôturer décemment). Les chutes de studio, inédits ou démo sont donc très rares et surtout très pauvres en intérêt. Ainsi, aucun inédit réellement enthousiasmant ne vient accompagner les excellents morceaux originaux présentés ici. Sans surprise également, Specials Force et Zipper Catches Skin sont très peu représentés (on se demande comment Flush the Fashion a réussi à tirer son épingle du jeu). Dans le cas de Zipper Catches Skin, nous avons tout de même droit à une chute de studio totalement allumée, "Look At You Over There, Ripping The Sawdust From My Teddy Bear" qui donne une image assez amusante/angoissante de l’état psychique dans lequel Vincent Furnier se trouvait lors de cette triste période de sa vie où il avait sombré dans l'alcoolisme.
La surprise vient également, d’une version personnelle de "Because", un titre de 1978 qu’ALICE COOPER interprétait sur la B.O de Sgt Pepper en duo avec les BEE GEES (ce titre figure initialement sur Abbey Road). Le reste s’avère bien dispensable. Tout au plus peut-on saluer l’ouverture d’esprit du bonhomme qui a inclu un titre du groupe BILLION DOLLARS BABIES, fondé par ses anciens compagnons de route jusqu’en 1974 (et auteurs d’un unique album paru en 1977). La présence de "I Miss You" est d’autant plus surprenante que le groupe s’était opposé en justice à ALICE COOPER au sujet de l’usage de leur nom.

Le dernier disque est également assez pauvre en découverte. On peut toutefois signaler un duo très jouissif avec Axl Rose sur "Under My Wheel" et une reprise du "Fire" d’HENDRIX, déjà présente sur Classiks (1995). Mais quel peut être l’intérêt d’une version démo d’un titre aussi peu inspiré que "He’s Back" ?

On le voit, pas de quoi crier au miracle. Reste une foule de titres originaux vraiment excitants qui méritent largement notre écoute, mais se trouvent un peu perdus aux côtés de titres réellement inintéressants. De ce fait, l’insertion de morceaux à destination unique des fans se révèle plus un frein qu’un cadeau. Un disque consacré uniquement à ces curiosités aurait probablement été plus approprié. Et aurait rendu l'écoute de ce pavé bien plus digeste.