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MUSIQUE CONTEMPORAINE  |  B.O FILM/SERIE

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Ennio MORRICONE - Peur Sur La Ville (1975)
Par AIGLE BLANC le 17 Février 2017          Consultée 2392 fois

AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Ennio MORRICONE a principalement travaillé avec des réalisateurs italiens (Sergio Leone, Pier Paolo Pasolini, Bernardo Bertolucci, Dario Argento, Marco Bellochio, Giuseppe Tornatore...), américains (Terrence Malick, Brian de Palma, Roland Joffe, Mike Nichols, Quentin Tarentino...) et français (Philippe Labro, Yves Boisset, Robert Enrico, Francis Girod, Edouard Molinaro, George Lautner, Jacques Deray...).
En France, sa collaboration la plus fructueuse, tant en terme de qualité que de fidélité, reste celle avec Henri Verneuil pour qui il compose pas moins de 7 bandes originales : La Bataille de San Sebastian avec Anthony Quinn (1968), Le Clan des Siciliens avec Gabin/Delon/Ventura (1969), Le Casse (1971) avec Jean-Paul Belmondo, Le Serpent (1973) avec Yul Brynner et Henry Fonda, I Comme Icare avec Yves Montand (1979) et Mille Milliards de Dollars (1981) avec Patrick Dewaere, autant de films populaires qui alternent le Policier, l'Espionnage et le Thriller politique, genres dans lesquels excellait le cinéaste, s'y révélant l'égal des Américains.
Des films de H. Verneuil auxquels Ennio MORRICONE a apposé sa griffe, Peur sur la Ville (1975) est celui ayant obtenu le plus grand succès. C'est sans doute aussi celui dont le score est le plus mémorable.

Sa réussite, Peur sur la Ville la doit à un confluent de talents : les dialogues mordants de Francis Veber, gorgés d'humour à froid, qui équilibrent l'atmosphère anxiogène du film. Les impressionnantes poursuites automobiles et ferroviaires de l'indétrônable Rémy Julienne*, le charme décontracté de Jean-Paul Belmondo (alias le commissaire Le Tellier) dans son premier rôle de flic, allié à son implication ultra physique dans la mesure où c'est l'acteur lui-même qui exécute les cascades spectaculaires conçues par Rémy Julienne, notamment une poursuite vertigineuse sur les toits des Galeries Lafayette ainsi que sur le plafond d'une rame de métro lancée à 60 km/heure, sans oublier une descente d'hélicoptère au-dessus de Paris, suspendu à un cable. Aucun autre acteur français, aujourd'hui encore, ne concurrence Belmondo sur ce terrain miné. Et, signature du film, la mise en scène nerveuse de Henri Verneuil qui ne s'encombre d'aucun chichi ni superflu, et surtout pas de psychologie.
Peur sur la ville conserve encore un indéniable pouvoir de fascination malgré ses 42 ans au compteur qui lui confèrent un certain charme 'vintage' : il figure parmi les 10 meilleurs films policiers français.

Depuis ses multi-diffusions sur les chaînes télévisées durant les années 80, la musique d'Ennio MORRICONE est devenue indissociable du film. Le compositeur, comme à son habitude, a magnifiquement compris et traduit le climat anxiogène du long-métrage. Un tueur qui se fait surnommer Minos assassine des femmes seules qu'il juge responsables de la décadence des moeurs de la ville. Il les harcèle dans un premier temps au téléphone avant de passer à l'acte une fois inoculée son emprise sur elles.
Le thème principal du film, "Peur sur la Ville", que l'on entend dès son prologue, est un concentré d'angoisse dont la réussite est due à la réunion de cinq facteurs : les battements cardiaques d'une caisse claire, le martèlement menaçant d'accords parallèles d'un piano, le sifflement décontracté d'Alessandro Alessandroni soutenu par un harmonica qui en épouse d'abord la ligne mélodique avant de s'en dissocier brutalement par des stridences évoquant un cri de terreur, le tout secondé par des ponctuations sporadiques de trompette bouchée. Ces éléments se superposent successivement dans l'ordre précité jusqu'à former une cacophonie des plus stressantes. Ce thème a acquis depuis une aura particulière. Il suffit d'entendre ses premières notes pour se souvenir des vues nocturnes aériennes de la ville d'où suinte un sentiment prégnant d'insécurité. On lui associe donc désormais l'angoisse des grandes villes la nuit au même titre qu'on associe au thème des Dents de la Mer de John WILLIAMS l'angoisse des profondeurs marines d'où peut surgir la machoire titanesque.
Ce thème est décliné selon plusieurs versions plus ou moins alternatives : "Considération sur un Homicide" n'en conserve que la partie cacophonique finale amenée cette fois par un crescendo de violons à coups de glissements d'archet qui se superposent. "Sur les Toits de Paris" qui met l'accent sur les trompettes joue avec la rythmique martelée du piano dont ne sont conservés que de brefs accords elliptiques. Le titre "Paris Secret" amplifie la piste précitée par des arrangements plus étoffés : la caisse claire y est plus appuyée, les trompettes plus loquaces, les glissements d'archet des violons plus lancinants encore. Quant à "Paranoïaquement vôtre", il s'agit de la variation la plus efficace, sans le sifflement et sans l'harmonica, mais soutenue par deux pistes entremêlées du piano marteleur que transpercent les improvisations d'une trompette bouchée absolument étouffante. Quant à "Mannequins", il remplace le piano par une guitare électrique et ralentit quelque peu le tempo. Sur une tonalité assez voisine, "A l'Angle d'une Rue de la Périphérie" propose un thème différent, plus ambigu, qui navigue entre le grotesque (la voix du cor) et l'inquiétant (le tissage lancinant des cordes en arrière-plan).
Il n'y a pas vraiment de scène d'amour dans Peur sur la Ville, à peine un début de romance très distancié entre Jean-Paul Belmondo et la jeune infirmière qu'il doit protéger chez elle afin de surveiller les appels téléphoniques qu'elle reçoit. Pourtant, Ennio MORRICONE a composé avec "Une Bouffée de Radio" une musique pop très sensuelle, dans le style qui est le sien, c'est-à-dire sur un tempo langoureux plus ou moins inspiré de la Bossa Nova, et magnifié par les gémissements lascifs de la délicieuse Edda Dell'Orso. C'est très hot. Mais il semblerait que la scène que cette musique devait accompagner ait été supprimée au montage, du moins considérablement raccourcie, si bien que de ce beau titre sentimental ne subsiste plus que quelques secondes à l'écran à travers une radio qu'écoute l'infirmière dans son appartement. Il est évident qu'Henri Verneuil a supprimé toute romance de son film, même si le scénario initial n'en était pas dépourvu d'où cette composition du Maestro certes délicieuse mais hors-de-propos en l'occurence.

Il existe deux versions de cette B.O. La version courte éditée en 1975, d'une durée approximative de 35 minutes, et la version complète, parue en 2013, qui réunit tout le matériel composé par E. MORRICONE, soit 40 minutes inédites non retenues au montage final. Je ne saurais trop vous conseiller de privilégier la version initiale, bien plus cohérente et davantage en accord avec la volonté d'Henri Verneuil d'éliminer de son film tout ce qui adoucirait la couleur noire de son pur thriller.

*Rémy Julienne était l'unique responsable des cascades dans les films d'action français. Il n'avait dans les années 70 et 80 aucun concurrent.

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   AIGLE BLANC

 
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- Ennio Morricone (compositions, orchestrations)
- Autres Musiciens (non crédités)


1. Peur Sur La Ville
2. Considération Sur Un Homicide
3. Sur Les Toits De Paris
4. Une Bouffée De Radio
5. Paris Secret
6. Paranoïaquement Vôtre
7. Otages
8. Peur Sur La Ville (finale)
9. Défense De Stationner
10. Mannequins
11. A L'angle D'une Rue Du Périphérique



             



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