Barbra STREISAND n’est pas sortie de nulle part. Native de Brooklyn New York, des ascendances juives polonaise et ukrainienne. Ses parents sont musiciens, mais le décès précoce de son père place la famille dans la difficulté. Barbra voit sa mère lutter pied à pied et se jure de devenir quelqu’un. Le chant lui vient d'emblée, facilement, naturellement, mais elle vise plutôt une carrière d’actrice. Elle croise Neil DIAMOND et Bobby Fischer sur son chemin d’adolescence. De fêtes en soirées, la jeune femme s’impose peu à peu, vit parfois presque dans la rue, mais s’en sort toujours. Sa liaison avec Barry Dennen, un acteur de musicals, l’aide beaucoup. Il est le premier à percevoir l’énormité de son talent et à l’enregistrer. Puis, c’est les night clubs, les premiers rôles à Broadway, son mariage avec Barry Gould, la célébrité, et enfin son premier album. Mais elle n’a que 20 ans !

Et Barbra ne fait pas dans la facilité. Elle s’attaque direct au plus fort du répertoire du great american songbook avec la "Cry Me A River" de Julie LONDON. Gonflée, la petite ! Soit. Mais on est aussitôt happé par la puissance vocale et l’incroyable personnalité qu’elle impose au standard. Elle le maltraîte, le tord, en fait une autre chanson et finit par renvoyer aux oubliettes le soit disant classique. Sa voix se fait douce, drôle, émouvante puis énervée, pressée ou carrément agressive. Elle ajoute des rires, des sourires et, au final, la fait sienne. Une performance dingue, c’est ce qui s’appelle débuter sur les chapeaux de roue. Ouais, ça déchire ! On ne ralentit pas sur "My Honey’s Lovin Arms", véritable explosion sonique, un défouloir pour la chanteuse qui se lâche totalement et jamais ne commet la moindre erreur.

Ah, cette lumineuse reprise du DISNEY des 3 petits cochons sur "Who’s Afraid Of The Big Bad Wolf" ! La encore, Barbra STRESAND impose son style hardi et peu conventionnel pour l’époque, ce qui fait toute la différence avec les autres chanteuses contemporaines. C’est à nouveau une merveille de gaieté et d’insouciance, je pense qu’elle est carrément imbattable dans ce registre. D’ailleurs, "A Sleepin’ Bee" symbolise pas mal l’éclosion du talent de la jeune New-Yorkaise. De la douceur, un zeste de candeur, une orchestration au cordeau. Avouons-le, le rendu est incomparable. La facilité évoque les grandes heures d’Ella FITZGERALD, pas moins. La fabuleuse douceur - encore ! - de "Happy Days Are Here Again" ne se dément pas. Cette version de miss Barbra, remplie de toute sa verve et de sa personnalité, fait grand bruit au point que la chanson devient sa 'signature song' pendant ses premières années lors des shows télévisés.

Elle défonce la version de Herb ALPERT sur "A Taste of Honey", se posant en directe concurrente de celle des BEATLES quelques mois plus tard. La pop et ses nombreux visages ne seraient-ils pas complémentaires finalement ?
"Come To The Supermarket In Old Peking" est la contribution involontaire de Cole Porter à ce premier album. Trop Musical pour vraiment bien passer sur disque, en retirant les images, mais la vélocité de la chanson lui permet d’affirmer son incroyable technique, cela dit. Puis elle pousse à fond sur l’accélérateur dès que débute "Keepin‘ Out Of Mischief Now" et s’impose avec une maestria jusqu’alors inégalée.

"I’ll Tell The Man In The Street" est sortie du vieux musical "I Married An Angel" en 1938. Bien sûr, la composition sonne aujourd’hui un brin surannée avec toutes ces cordes, mais la voix agit telle un aimant pour tous les sens.
"Much More" est encore une performance vocale de premier ordre ; tout juste peut-on lui reprocher d’être une composition moins mémorable. "Soon It’s Gonna Rain" déroule une orchestration qui laisse la part belle à la voix de Barbra, toujours dans un esprit B.O. La voix s’envole et ne faiblit jamais, toujours originale et complexe.

On a envie de crier à la face du monde qu’on a découvert la voix des anges sur ce premier opus ! L’incroyable qualité de la voix de Barbra saute à toutes les oreilles. C’est bien simple, je ne vois personne qui pourrait dire le contraire quel que soit son genre de prédilection ! La qualité irréprochable de sa voix et sa manière tellement novatrice d’attaquer les grands classiques en font un premier opus essentiel et, bien sûr, à vivement conseiller pour débuter l’écoute de la New-Yorkaise. On est d'emblée immergé dans la potion magique, c’est l’organe vocal par excellence ! Un très beau 4 pour débuter cette disco !