Nous sommes en 93 et Barb a déjà 51 ans lorsque sort le vingt-sixième opus de la native de Brooklyn. Ce nouvel album à la gloire de Broadway montre que la jeune femme a clairement pris son parti de tous les styles qu’elle a déjà su adapter à son escarcelle de chanteuse. Oublions quelques temps la folk, la pop ou l’AOR, nous voici de retour où les choses ont commencé. Voyez donc la confiance qui irradie de tous les pores de la quinquagénaire, pas de doute, Barbra STREISAND maîtrise son art et elle le sait ! Ok nous sommes dans les nineties, mais ni Mariah CAREY ni Whitney HOUSTON ne peuvent concurrencer Barb sur son propre terrain. Livraison 93, c’est parti !

"The Music of The Night" partage le titre phare de la B.O de Phantom of The Opera avec Michael CRAWFORD, le chanteur de ce musicals qui ne date que de quelques années. C’est ça, les musicals modernes... on y décèle une très forte touche classique. La douceur du titre ne tarde pas à nous emporter loin, et les deux voix se complètent à merveille pour un instant de grande intensité émotionnelle, sans nul doute le top de cette livraison et un des plus grands instants de la carrière de miss STREISAND. La puissance incroyable de la voix de Barb complète à merveille le phrasé parfait de Michael. Nous sommes supra smooth sur "The Man I Love", titre de 1924 sorti de l’imagination féconde des GERSHWIN, un instant de glorieuse beauté, avec une Barb au sommet de son art, qui en rajoute sans toutefois trop en faire. Un véritable nuage de douceur pour une jolie déclaration d’amour qui doit sonner très kitsch aujourd’hui.

"Some Enchanted Evening" est un titre de belle allure, dans la grande tradition des classiques des musicals avec un petit côté moderne, malgré une orchestration qui déborde de cordes. Elle date pourtant de 1949, le classique live de BOC porte ce même nom étrange de la comédie musicale des années 40. Atmosphère de B.O des eighties avec ses gros synthés, "Luck Be A Lady" n’en peut plus de connaître des versions différentes, la classique étant l’apanage de Frankie SINATRA. S’il en est une qui peut concurrencer l’icône de Hoboken c’est bien sa voisine, la native de Brooklyn, et le résultat est à la hauteur. Cet album est d’ailleurs pour Barb un véritable trésor de mélodies et de raisons de foutre une pilée à tous les chanteurs de la création. "As If We Never Said Goodbye" ne fait pas exception à la règle.

Petit titre de jazzy pop cool avec des intonations modernes tirées de la fusion, "Speak Low" est agréable. "I’ve Never Been In Love Before" est un slow B.O larmoyant, avec ce qu’il faut de kitscherie pour plaire au public ricain la larme à l’œil devant sa petite New-Yorkaise. "With One Look", issu de la B.O de Sunset Boulevard permet à Barbra d'exploiter toutes ses capacités vocales, ce qui n’est pas peu dire. Puissance, volupté et précision en permanence n'autorisent aucun instant de faiblesse, alors que la chanteuse a déjà plus de cinquante printemps.

Nous retrouvons le grand Stephen SONDHEIM sur quatre titres : "Move On" tape à nouveau dans le style si particulier du compositeur puis "Everybody Says Don’t" nous joue le grand jeu de la comédie musicale dynamique et pleine d’entrain. Séparée des images, c’est un brin moins brillant mais ça se laisse déguster. "Children Will Listen" qui évolue entre berceuse et romantisme date de 1987. Pas foufou de dynamique mais la compo laisse le loisir à Barb de briller de mille feux sur des portions fort difficiles. On retrouve Johnny MATHIS sur la reprise de West Side Story, pas la plus connue certes avec "I Have A Love/One Hand One Heart" mais quand il s’agit de Leonard BERNSTEIN, on ne fait pas la fine bouche. Johnny fait un peu pâle figure face à la puissance de Barb qui éclate tout sur son passage.

Bah, c’est la came préférée des habitants du pays de l’oncle Sam. Du musical, de la grandiloquence et l’impression faussée qu’ils sont les maîtres du monde et les plus forts. L’efficacité est indéniable mais on repassera pour l’originalité, puisque nous n’avons ici que de la reprise. Les arrangements sont certes de qualité. La présence de "The Music of The Night" et, à un degré moindre, de "The Man I Love" fait son effet. Il n’en demeure pas moins vrai que cela reste de la seconde main et je vais donc rester sur un trois équilibré qui s’adresse aux fans du style.