Le précédent opus de Barbra STREISAND contenait deux titres en français, le "Non c'est rien" rendu célèbre dans nos contrées par l’avignonnaise Mireille MATTHIEU et le "C'est si bon" de Charles TRENET. Alors, petit pied de nez au destin et décision étonnante d'une si jeune artiste de se mettre en danger en allant chanter pour le monde entier dans la langue de Molière ? C’est aussi symbolique de la capacité de la jeune femme à s’intéresser à tous les genres, tous les styles, sans limites. Sa fabuleuse voix ne semble de toutes manières pas connaître les problèmes auxquels nous sommes tous confrontés. C’est donc le neuvième opus de Barbra, son dernier de l’année 66, en pleine domination sans partage de la variété internationale.

Telle une B.O d’un James BOND, "Free Again" introduit l’opus avec verve et le talent unique de BARBRA, toujours prête à faire siennes les plus grandes compositions. Une sublime chanson au final, sans doute le point d’orgue de cette livraison. Chez nous, comme vu précédemment, Mireille MATTHIEU dispose du classique avec "Non c’est rien", qu’elle avait chanté en français dans Color Me Barbra. Le "Et Maintenant" de Gilbert BECAUD est l’une des chansons les plus reprises de la création, les anglophones l’adorent. Alors "What Now My Love" donne une opportunité à Barbra de recréer le titre sous une ambiance quasi rock’nroll avec un très joli swing. Un des moments forts de cette livraison.

Tout le monde va reconnaître "Que reste-t-il de nos amours" avec "I Wish You Love". Ce classique intemporel créé par Charles TRENET trouve une seconde jeunesse dans la trépidance de la version ici choisie par Barbra STREISAND, qui la domine des pieds et de la tête ! Evidemment, en France, tout le monde connaît "Parlez-moi d’amour", ce qui nous donne en anglais "Speak To Me Of Love". Une chanson d’un classicisme intemporel, Lucienne BOYER en a fait le standard et le film Casablanca s’est chargé du reste. On signale la version de DALIDA dans l’hexagone, Barb s’en sort fort bien.

Un alto introduit "Les feuilles mortes" de Jacques Prévert et Joseph Kosma. Il faut une belle voix pour cette composition fabuleuse. Barbra livre donc sa vision personnelle de "Autumn Leaves", soutenue par des cordes automnales, comme il se doit. Elle se pose en concurrente directe du classique qui appartient toujours à Yves MONTAND. Et il y a là la première composition de Barbra, elle présente donc "Ma première chanson" avec les paroles écrites par Eddy Marnay pour l’occasion. L’ambiance est belle et très B.O, à l’image de ce que font à la même époque Frank SINATRA ou Perry COMO. C’est charmant.

La chanson de Bruno Coquatrix – le boss de l’Olympia, les gars - "Clopin clopant", ne marque pas particulièrement les esprits. C’est bien sûr éminemment franchouillard, ce genre de compo, soutenue par une orchestration jazzy très éthérée. Il y a ici plusieurs chansons composées par Michel LEGRAND : "Once Upon A Summertime", c’est la "Valse des lilas". Barb nous fait le dernier couplet en français écrit par Eddie Barclay. On signale aussi les versions de Sarah VAUGHAN et d’Astrud GILBERTO. C’est à nouveau lui avec la douce "Martina", parfaite pour la chanteuse new-yorkaise dont la douceur du timbre s’adapte à merveille à cette composition sensible et éthérée. "Love And Learn" achève cette contribution du grand compositeur français avec le même élan romantique et sensible.

Sa performance sur le boléro qu’est "Le mur" rappelle Edith PIAF à bien des égards. Sa manière d’asséner les syllabes, en français qui plus est, est relativement nouveau pour elle. Son charmant accent n’est pas problématique, et l’ensemble a belle allure. L’aspect martial qui demeure sur la version anglaise "I’ve Been Here" permet à Barbra de scander la chanson de manière plus naturelle, et lorsque le boléro s’emballe, la fusion voix-musique devient un véritable must. Comme à l’accoutumée, on ne déplore pas un seul instant de faiblesse, malgré la difficulté du chant sur une pièce pareille.

Difficile de se montrer sévère avec un pareil assemblage de classiques, d’autant que la chanteuse n’est jamais à la rue, sur aucun titre, quelle que puisse être la difficulté à laquelle elle est confrontée. Des classiques à la pelle donc, avec juste sa première composition. On signale le super "I Wish You Love" sous des atours très modernes et qui font la part belle à la dynamique. Globalement, cela s’écoute d’un trait sans se poser la moindre question. Un trois difficile à négocier.