Recherche avancée       Liste groupes



      
ROCK N'ROLL  |  STUDIO

Commentaires (2)
L' auteur
Acheter Cet Album
 


 

- Style : Dick Rivers , Johnny Hallyday , Jacques Dutronc

Eddy MITCHELL - Rocking In Nashville (1974)
Par BAKER le 2 Mai 2018          Consultée 2876 fois

1974. Période vachement troublée. Nous avons laissé EDDY dans l'état où nous l'avions trouvé : au fond du caniveau. Le moral dans les chaussettes. Noires, les chaussettes. Ca tombe bien, ledit groupe redevient curieusement à la mode le temps d'un été. Ressortie inopinée de quelques singles, redécouverte du groupe par une génération que les moins de vingt ans ne pouvaient pas connaîiiitreuh, la maison de disques sent la bonne affaire et, comme EDDY ne vend plus rien, lui propose de reformer le groupe le temps d'une mini-tournée. Piqué au vif, parce que même dans ses heures sombres l'homme avait sa fierté, EDDY refuse et rétorque que si la production veut vraiment un disque de rock'n'roll avec Eddy Mitchell, qu'elle lui donne les moyens de le faire correctement.

La suite est non seulement décisive, mais reste dans les annales de la chanson française. EDDY et son producteur fidèle Jean Fernandez partent à Nashville, un des berceaux de la musique américaine. Et peu importe le budget, peu importent les compromis, les deux hommes se mettent en tête de produire un disque authentique qui sonne américain tout en conservant la Schmollitude adéquate. C'est la rencontre avec Charlie McCoy, multi-instrumentiste mais particulièrement harmoniciste virtuose, qui scelle le sort de notre rockeur désormais crooner. L'album est presqu'exclusivement composé de reprises, joué par des musiciens très haut de gamme choisis par le père Charlie, et le retour en France est triomphal. Les ventes explosent, la popularité d'EDDY se retrouve d'un coup boostée comme jamais il n'en aurait rêvé.

La raison en est simple : malgré un petit coup de mou (la face B est quand même moins forte que la A), ce disque est d'une qualité bien supérieure, non pas seulement à ce que faisait EDDY depuis quelques années, mais à tout ce qui se faisait en France à l'époque en matière d'imitation ricaine. Car si des CHRISTOPHE, des LENORMAN, des ADAMO ou des SARDOU avaient leur univers et leurs qualités, dès qu'on essayait de sonner country ou rock US, il y avait Johnny et EDDY... et puis les autres. EDDY a tout compris, et notamment que si la voix est portée au premier plan, il n'était pas question de laisser la musique être un simple alibi bas de gamme, comme c'est bien trop souvent le cas aujourd'hui (VIANNEY, je te regarde). Les musiciens sont donc mis à l'honneur, en débutant par le titre d'introduction qui est le véritable début d'une nouvelle carrière. EDDY introduit ses musiciens un par un, dans la grande tradition du spectacle, là où en 2018 vous arrivez à acheter 26 euros des vinyles où il n'y a même pas les crédits (Julien DORE, je te regarde).

Une introduction décomplexée, et c'est ce qui va faire la force de MITCHELL pendant les prochaines années : on sent le gars totalement à l'aise, un poisson dans l'eau. Du coup, ses textes sont de plus en plus finement ciselés, et il enquille les classiques. Les chœurs donnent de la force à "Bye Bye Johnny", "Fume Cette Cigarette" (titre totalement impossible à écrire de nos jours) lui permet de trouver son ton de conteur, qu'il réutilisera plus tard (dans "L'Arche de Noé" notamment), "A Crédit et en Stéréo" est un gros classique drôle et grinçant, "C'Est Un Piège" sent le vrai plaisir d'être en studio. Il se permet même une petite mise au point sur sa carrière et les médias avec "C'Est Un Rocker" (taillé pour le live) : ce n'est pas la première fois qu'il le fait, ce ne sera pas la dernière, mais à chaque fois il trouve le ton pour ne pas paraître nombriliste (Claudio CAPEO je te regarde). Et quand il se tait, les musiciens s'en donnent à cœur joie : somptueux duels de pedal steel sur "Ruby", guitare rythmique folle furieuse sur "Fume", chœurs irrésistibles sur "C'est La Vie", le fait qu'ils ne parlent pas un mot de français rajoutant un indéfinissable charme (c'eeeest le vi, moooon chéwi !).

Ce disque est donc globalement réussi, mais c'est aussi un chaudron d'exploration ; comme toutes les expériences scientifiques, il y a quelques légers dégâts collatéraux. La doublette "Là Dans Mon Cœur" / "Ruby" est un peu faiblarde, par exemple. Et puis il règne sur cet album comme un sentiment de légèreté (copyright ZAZ) qui le rend vraiment sympa, mais pas totalement inoubliable. Eh là ! soyons lucides : le bond en avant qualitatif est déjà colossal. Egalement, le sentiment qu'EDDY s'est enfin totalement trouvé artistiquement. Et puis, parmi tous ces titres qui sont plus ou moins des standards du rock'n'roll et du country blues, une chanson se démarque, stylistiquement parlant. Plus groove, plus soul, avec des harmonies largement plus recherchées, "La Ballade de Bill Brillantine" n'est pas la meilleure piste du microsillon, mais elle est intéressante, avec une ambiance soignée, et surtout, c'est une chanson inédite composée en France. Et malgré toutes ces différences, elle ne dénote pas dans l'album. EDDY saura-t-il s'en souvenir ?

En attendant la suite de votre feuilleton dominical, EDDY peut savourer sa victoire : non seulement le disque est un triomphe commercial, mais plus important dans son cœur, il est fait l'année d'après citoyen d'honneur de Nashville. Un pied en France, un pied aux USA : il en a toujours rêvé, il le réalise. Mais le plus incroyable est que ce sursaut de carrière n'est qu'un prélude. Comme en forme de clin d'oeil, l'excellente et sous-estimée "Je Ne Deviendrai Jamais Une Super Star" pose les jalons d'un gros paquet de futurs tubes à venir, et place EDDY dans le camp des losers magnifiques. Qui continuent d'essayer. Parce qu'il n'y a que cela à faire.

A lire aussi en ROCK N'ROLL :


Jerry Lee LEWIS
High School Confidential (1958)
Les débuts du killer




LITTLE RICHARD
Here's Little Richard (1956)
Richard 1er le petit


Marquez et partagez





 
   BAKER

 
  N/A



- Eddy Mitchell (chant)
- Charlie Mccoy (harmonica)
- Wayne Moss (basse)
- Kenny Buttrey (batterie)
- David Briggs (piano)
- Pig Robbins (piano)
- Billy Sanford (guitare)
- Reggie Young (guitare)
- Dave Sellars (guitare)
- Jim Colvard (guitare)
- Bobby Thompson (banjo)
- Russ Hicks (pedal steel)
- Weldon Myrrick (pedal steel)
- Buddy Spicher (violon)
- Jim Isbell (batterie)
- The Hollayday Sisters (choeurs)
- The Jordanaires (choeurs)


1. Présentation Sur 'southern Comfort'
2. Bye, Bye, Johnny B. Good
3. À Crédit Et En Stéréo
4. Fume Cette Cigarette
5. C'est Un Piège
6. Emmène-moi Où Tu Veux
7. C'est Un Rocker
8. C'est La Vie, Mon Chéri
9. Là Dans Mon Cœur
10. Ruby, Tu Reviens Au Pays
11. La Ballade De Bill Brillantine
12. Je Ne Deviendrai Jamais Une Superstar



             



1999 - 2024 © Nightfall.fr V5.0_Slider - Comment Soutenir Nightfall ? - Nous contacter - Webdesign : Inox Prod