Big Generator est le petit frère de 90125. Le 15ème album du groupe qui sort le 17 septembre 1987 arbore fièrement ses 8 titres, assurant une continuité musicale déjà amorcée par la bande à Anderson sur Drama, puis sur 90125, et laisse envisager que le groupe va sonner de façon si particulière et intense.

Un changement radical certes, mais pas au détriment de la recherche musicale ni des mélodies où, là encore, la voix étincelante de Jon Anderson fait des merveilles. La puissance d’Alan White aux drums est phénoménale, les guitares de Trevor Rabin sont affûtées comme des couperets, les claviers de Tony Kaye toujours aussi inspirés et complémentaires. Cet album puissant et déroutant entre dans le vif du sujet avec "Rhythm of Love" et ses chœurs passés au polish. Une rythmique impeccable, des voix parfaitement harmonisées, des riffs de guitares très proches de ce que faisait The POLICE à la grande époque, donnent toute sa profondeur et sa justesse à ce titre. Trevor Rabin nous gratifie même d’un solo façon 'tapping' pour une entrée en matière sulfureuse et tubesque à souhait. C’est d’ailleurs certainement ce qu’a voulu faire le groupe : rééditer l’exploit d’ "Owner Of A Lonely Heart", mais là encore, "Rhythm of Love" a du mal à accéder au rang de tube, malgré son formidable potentiel musical.

"Shoot High Aim Low" est un titre à l’ambiance feutrée où la batterie et les voix sont mises en avant dans un couplet assez minimaliste. Le refrain est simplement agrémenté de grosses nappes de synthés et de chœurs démultipliés. "Almost Like Love", avec son intro tout en riff acéré et sa section de cuivres toutes voiles dehors, donne un couplet assez pop alors que les guitares lui confèrent une allure plus hard.
Le second titre essayant d’accéder au rang de tube est le superbe "Love Will Find A Way" à l'intro style 'musique de chambre', reprise juste après par le riff de Trevor Rabin. Ici aussi, les voix font des merveilles et lui donnent une dimension supérieure. Un gimmick très accrocheur.

Une des perles de l'album est sans nul doute "Final Eyes" au couplet enchanteur, à la flûte de pan et aux arpèges de guitares très recherchés et aguicheurs. Dans ce titre vraiment bien construit, les pièces s’imbriquent les unes aux autres comme dans un puzzle. Assurément, une pièce maîtresse de l’album. "I'm Running", à l'intro hispanisante et au rythme syncopé, délivre les avant-dernières notes de l'opus. Le couplet donne place à une ambiance feutrée où guitare, piano et voix se font la part belle. Le morceau part un peu dans tous les sens et semble un peu longuet, mais c’est un vrai régal pour les connaisseurs. Pour finir, "Holy Lamb" qui aurait mérité une ou deux minutes supplémentaires, n'en demeure pas moins un bon titre.

Cet album n’obtient pas tous les suffrages, mais ses qualités sont multiples : des voix parfaitement maîtrisées, une instrumentation sans faille et très à la pointe du progrès, des mélodies fraîches et plaisantes. Alors pourquoi ce disque a t-il moins bien marché que son grand frère ? Peut-être tout simplement parce que l’effet de surprise ne prend qu’une fois, et que 4 ans plus tard, la magie de 90125 n’opère presque plus sur Big Generator.