YES.
Un nom qui a marqué son temps, représentant d'un genre aussi décrié qu'admiré : le rock progressif. On s'attaque là à un des piliers de la musique rock. Close to the Edge est généralement conseillé lorsqu'un néophyte tente l'aventure de YES, choix discutable mais pas pour autant dénué de sens. En effet, cet album contient les principaux éléments qui font du groupe ce qu'il est (ce qu'il était?). Que ce soit dans la haute technicité de chacun des participants, dans les compositions alambiquées en plusieurs parties, dans les envolées lyriques des voix et des claviers baroques ou dans l'ambiance onirique de la plupart des titres, on a ici affaire à une référence du genre.

Il faudra sans doute du temps au néohpyte pour apprécier l'album. Moi-même, je n'ai pas su le faire quand je l'ai écouté la première fois, ce n'est que bien plus tard que j'en ai découvert les vertus. Tout d'abord, la longueur des morceaux peut en rebuter plus d'un. Et pourtant, lorsqu'on s'est familiarisé avec ce format, on se surprend à penser que le temps nous joue un de ses tours favoris, celui d'aller plus vite que d'habitude. Comment? Le morceau-titre, 19 minutes au compteur, est déjà fini? Et il s'est passé des choses pendant tout ce temps. Au travers de ces refrains puissants et lyriques, de ces multiples ponts instrumentaux et de ces envolées virtuoses, on a assurément affaire à un des meilleurs titres de YES.
La seconde piste plus calme, plus posée perd ainsi en puissance ce qu'elle gagne en mélodie. Menée par la guitare acoustique de Steve Howe, celle-ci est la plus poétique des trois, celle qui nous renvoie le plus au sentiment d'être au milieu d'un rêve, où les gouttes de pluie sont des notes de claviers perlant sur le paysage fantastique de la pochette (qui ressemble beaucoup à celle de Fragile. Logique puisque les deux ont été dessinées par Roger Dean). Les mauvaises langues disent que c'est aussi un titre extrêmement pompeux, remarque pas totalement infondée, mais on pardonne vite cet écart vu la qualité des mélodies et du morceau en général.
La dernière composition est elle aussi un modèle du genre, guitare sautillante, arrangements à tomber par terre, structure inhabituelle, et qui plus est dotée d'un excellent riff, ce qui n'est pas si courant dans le rock progressif. Encore un très bon titre en somme.

Alors, qu'est-ce qu'il a de mauvais cet album? Chacun a son petit défaut, ici c'est la relative difficulté d'accès et le caractère parfois prétentieux des morceaux qu'on met en exergue, comme dans beaucoup d'oeuvres progressives. En effet, YES est l'un des archétypes du genre, comme GENESIS, sur lesquels ont pu se déchaîner les critiques. Pourtant, seul YES possède cet univers de fantaisie, issu d'un conte de fée que 5 adultes auraient revisité à leur sauce, ce caractère de symphonie fantastique, de voyage propre au monde du rêve, ce goût d'irréel qui plane sur chacune des compositions luxuriantes, et surtout cette pulsation organique qui l'anime et rend le tout vivant, loin de certains groupes qui noient les émotions sous la technique et le groove sous la complexité. Oui, on peut faire une musique difficile et compliquée mais sans en faire trop (cependant YES est à l'extrême limite qui sépare les deux, ou pour être plus en accord avec le titre, au bord du gouffre).
Un grand album qui fait entrer YES dans la légende. Le groupe s'aventurait alors dans des territoires musicaux inexplorés, au risque de trébucher. C'est peut-être ça le sens du titre : le groupe est allé près du bord pour nous trouver cette musique : Close To The Edge.