Entre 1968 et 1972, la musique de PINK FLOYD accède à une richesse qu’elle ne retrouvera plus ; un juste équilibre entre psychédélisme, planant, blues, musiques classique et orientale. Si les albums bénéficient des techniques du son, ils manquent souvent de puissance et de folie et souffrent de même d'un contenu inégal. Sur scène, le groupe continue à faire évoluer un répertoire que le studio a trop vite figé, si bien que sa discographie pirate est – en de nombreux points – plus intéressante que sa discographie officielle.

Le Live at Pompeii n’est pas un bootleg, mais s’inscrit dans cette optique. Sur le plan strictement musical, il ne constitue pas un sommet, certains bootlegs lui étant supérieurs. Il a néanmoins un intérêt inestimable : joindre l’image au son. Après Barbet Schroeder et Michelangelo Antonioni, c’est Adrian Maben qui s’intéresse au 'flamant rose' pour le mettre cette fois devant la caméra. Le groupe est filmé de jour et de nuit dans les arènes de Pompéi en octobre 1971. Toutes les séquences du film n’en sont toutefois pas issues. Le décor minéral et l’art gréco-romain prolongent sa musique avec une certaine intelligence. L’expérience prend d’ailleurs des allures de documentaire. L’absence de public est également une idée forte qui confirme que le rock peut prendre vie en dehors d’une salle de concert.

Live At Pompeii offre un aperçu fidèle de la musique de PINK FLOYD malgré l’absence regrettable d’"Embryo" et d'"Atom Heart Mother". L’interprétation appelle elle aussi un regard critique. Le matériel issu de Meddle (déjà enregistré mais pas encore publié à l’heure du tournage) s’écarte peu des versions studios et n’a pas le niveau de maturation des titres plus anciens. Le fractionnement d’"Echoes" en deux parties est toutefois une bonne idée que le groupe reprendra pour "Shine On You Crazy Diamond". "Careful With That Axe Eugene" n’a pas son explosivité habituelle, explosivité qui permit pourtant à ce sympathique 45-tours de devenir une pièce maîtresse du répertoire floydien. "A Saucerful of Secrets" est joué à la perfection et tient toutes ses promesses en terme d’orgie sonore, même si l’on regrette une partie improvisée trop courte et une partie mélodique trop longue. "Set the Controls For the Heart of the Sun" enfin, fait l’objet d’une interprétation brillante, étirée, intense, torturée et colorée ; définitivement le diamant noir du groupe.

Ce film marque la fin de la période psychédélique de PINK FLOYD. La musique y dépasse en terme de son et d’interprétation le live d’Ummagumma. Live at Pompeii s'avère donc un document sonore intéressant compte tenu de la quasi absence de live officiels, mais insuffisant pour qui souhaite approfondir cette période. Sur le plan visuel, l’entreprise est une réussite qui justifie l’acquisition du DVD. Plus symboliquement, elle immortalise l’osmose et la complicité entre les musiciens que le succès allait bientôt dégrader. C’est assurément l’image du groupe qu’il faut conserver.

Les éditions récentes contiennent des interviews et des extraits des séances d’enregistrement de Dark Side of the Moon. Ces ajouts n’apportent rien au propos initial mais permettent de mesurer le changement d’approche radical du groupe à l’aube de son explosion commerciale.