Est-ce que Chrome Dreams doit être considéré comme un album à part entière de Neil YOUNG ? Ce disque a en effet une histoire un peu particulière. Il fait un peu partie de la grande famille des albums qui peinent à sortir ou qui ne sortent jamais. On peut citer The Rat Patrol From Fort Bragg des CLASH, le Rock Is Dead des WHO, ou le Smile des BEACH BOYS… Neil YOUNG est un habitué de cette pratique puisqu’il avait déjà fait le coup avec le CSNY et l’album Human Highway finalisé en 1973. Et ces dernières années il a déjà ressorti de ses cartons des albums qu’il n’avait pas voulu publier des décennies plus tôt. Ainsi, en 2020 il a sorti Homegrown initialement composé en 1975, puis en 2022 Toast, enregistré, lui, en 2001.

C’est désormais au tour de ce Chrome Dreams originellement enregistré en 1977 de renaitre de ses cendres en 2023. Mais il n’y a pas lieu de sauter au plafond car tous les titres présents sur cet album sont déjà connus. En effet, Neil YOUNG les a tous publié sur différents albums qu’il a commercialisé par la suite. Parfois dans des versions légèrement différentes. Ainsi, "Pocahontas", "Sedan Delivery" et "Powerfinger" sont parus sur Rust Never Sleeps (1979). "Star Of Bethlehem", "Will To Love", "Like a Hurricane", "Homegrown", "Hold Back The Tears" sont présents sur American Stars 'n Bars (1977). "Too Far Gone" est paru sur Freedom (1989). "Captain Kennedy" sur Hawks & Doves (1980). "Stringman" sur Unplugged (1993). Et "Look Out For My Love" sur Comes a Time (1978).

Alors soit, la plupart de ces titres sont très bons et agréables à écouter. Au delà du méga tube "Like a Hurricane" on peut citer le nerveux "Sedan Delivery", le plus calme et mélodieux "Will To Love" avec ses bruits de feu de camps en arrière plan. Ou bien encore le très Folk, "Hold Back The Tears". Et il est clair que, s’il était sorti en 1977, ce Chrome Dreams aurait eu le potentiel pour devenir un très gros succès tant les morceaux qui le composent sont brillants et convaincants. On y retrouve le charme de Neil YOUNG et la capacité qu’il a de briller dans la simplicité. Le matériel est si bon que l’on peut se demander ce qui a poussé the Loner à ne pas sortir ce disque. Mais, trouver de la cohérence dans toute la carrière du Canadien est une entreprise bien trop ardue pour moi.

Bien qu’il ait été enregistré avec des formations différentes, l’ensemble est assez logique et cohérent. Il n’y a guère que le dernier titre, "Look Out For My Love" et "Homegrown" qui sonnent un peu différemment des autres et ont une saveur un peu plus moderne. Comme s'ils étaient issus de cessions datant plutôt de l’époque du début des années 80. Ce qui n’est pourtant pas le cas puisque "Look Out For My Love" est une des premières chansons enregistrées, en 1975.

On en vient donc à un bilan mitigé : d’un côté on pourrait considérer que nous avons là un très grand album de Neil YOUNG. Mais, du fait que tous les autres titres sont déjà connus et désormais rattachés dans notre inconscient à d’autres albums, il y a un léger sentiment de déjà-vu.
A noter que Neil YOUNG a sorti un album appelé Chrome Dreams II, qui contient un morceau fantastique de 18 minutes 12, "Ordinary People". Le seul point commun que je trouve entre ces deux disques étant la pochette qui, dans les deux cas, reprend des éléments de la calandre d’une voiture Chrysler. Qui dans le cas de Chrome Dreams est l’œuvre de Ron WOOD (ROLLING STONES), alors que celle de Chrome Dreams IIest due au Producteur David Briggs.

Quoiqu’il en soit, cette opération de publication d’albums oubliés devrait continuer puisque la sortie de Oceanside Countryside, originellement enregistré en 1977 est annoncée pour cette année.