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Jerry Lee LEWIS - The Killer Rocks On (1972)
Par LONG JOHN SILVER le 10 Juillet 2020          Consultée 1122 fois

Difficile d’y retrouver ses petits dans la disco de Jerry Lee LEWIS (a.k.a The Killer), ensevelie sous une tonne de compiles plus ou moins douteuses. Ce sont les premières années qui sont les plus reconnues, celles marquées par le sceau du Rock'n'Roll old school. Ce qui fait que logiquement Jerry Lee fait partie des pyramides du Rock, celles du haut desquelles 20 siècles vous contemplent. Enfin à peu près. Les chroniques d’Erwin, fin connaisseur de la bête, vous enseignent néanmoins qu’on ne peut réduire l’homme au seul camp du Rock'n'Roll. Devenu paria durant les 60’s à cause d'une sombre affaire de mœurs, Jerry Lee avait trouvé refuge auprès du public Country. Laissant quelque peu le Rock'n'Roll de côté, d’autant que le style avait quand même pas mal battu de l’aile à la fin des 50’s, puis la British invasion avait fait exploser son canevas, dépouillant son aile Roll et ne conservant que la partie Rock. Fin 60’s début 70’s, voilà que le Rock'n'Roll trouve un second souffle. On pense au festival de Toronto en 1969 (Rock'n'Roll Revival ou Live Peace, c’est selon), des artistes tels que Chuck BERRY, LITTLE RICHARD ou Bo DIDLEY s’y produisent devant des foules conséquentes. D'autres événements à succès sont organisés au States. En 1972, à Londres, le stade de Wembley devient le théâtre qui accueille le London Rock'n'Roll Show, où hormis les stars précitées, on retrouve aussi Bill HALEY. Jerry Lee n’a pas loupé ce coche-là puisqu'il figure (entre autres) à la programmation des deux sommets évoqués plus haut. 1972, c’est aussi l’occasion pour notre Killer de publier un album dédié au Rock'n'Roll, The Killer Rocks On.

L’album est produit par Jerry Kennedy, également musicien, qui y joue de la guitare. L’homme est un spécialiste du registre Country/Rock'n'Roll. Il a assumé la prod' de plusieurs disques de Jerry Lee à cette période de sa vie et un de ses faits d’arme est d’avoir aussi participé aux sessions de Blonde On Blonde de Bob DYLAN en 1966. Les sessions de The Killer Rocks On ne sont pas de tout repos nonobstant le fait que nous sommes à une période où Jerry Lee publie de la bande son au kilomètre, ce qui n’est pas sans effet sur la qualité de la musique produite. Non pas en terme de finition, tout est impeccable ici, mais en terme d’intérêt artistique. Jerry Lee exige que tout le monde soit présent quand il enregistre, malgré un effectif de musiciens pléthorique, change la tonalité des chansons quand ça lui chante, refuse au maximum les overdubs, donnant des sueurs froides aux ingénieurs du son et aux arrangeurs. Cela aurait pu déboucher sur un produit relativement brut, un truc excitant. Pourtant, Jerry Kennedy est bien parvenu –in fine- à rendre une copie pas mal édulcorée, aux bords arrondis, de la musique du Killer. Un disque consensuel, fait pour un public familial, pourvu de chœurs féminins et de lits de cordes, loin des débordements usuels du chanteur pianiste connus depuis ses débuts. Et c’est bien dommage.

L’album s'ouvre avec "Don’t Be Cruel" du King Elvis, au tempo soutenu, mais la voix du Killer reste bien dans les clous. Derrière, les violons n’apportent strictement rien d’objectivement intéressant. On se demande ce qu’ils font là. Ce premier extrait résume assez bien le reste du disque, avec des morceaux souvent joués up-tempo comme si tout le monde courait après son métro et l’impression que même le maître de cérémonie est en roue libre. Même si pour une fois les chœurs féminins de "You Can’t Have Her", morceau teinté de Soul, semblent assez appropriés. On retrouve l’orchestre de cordes sur "Games People Play" et on oscille entre les prod' maousses du King en résidence à Las Vegas et le Wall of Sound cher à Phil Spector, toujours en se demandant si tout cela convient à Jerry Lee LEWIS. Se poser la question, n’est-ce pas y répondre ? De fait, ce qu’on entend n’est pas mauvais, si ce n’est que le Lion ne rugit pas vraiment et que ses crocs sont polis. Aucun animal n’a été blessé, précise la fiche. Cependant, on pourrait ajouter que peu d’auditeurs ont été interpellés une fois passé la sentence du temps. On retient néanmoins "Turn On Your Love Light", où ce sont les cuivres qui ensemencent le background d'un morceau de Soul Music franchement roboratif, un des rares moments où notre Killer préféré lâche les chevaux pour de bon.

À l’époque, c’est "Chantilly Lace" qui avait capté l’attention. Ce titre écrit par un certain J.P Richardson (a.k.a Big Bopper), disparu dans le même avion que Buddy HOLLY, était inconnu de Jerry Lee. Il l’enregistre sur les conseils de son manager, en une seule prise. Effectivement, la chanson tire son épingle du jeu, avec un Killer un tant soi peu mordant. Juste après, on note la présence de "C.C. Rider", standard repris par moult artistes américains, ici très bluesy. Autre curiosité, la reprise de "Me And Bobby McGee", chanson Country de Kris Kristofferson dont la version de Janis JOPLIN reste la référence, jouée en mode Rock'n'Roll, ce qui n’est pas pour me déplaire malgré une prod' qui lave toujours plus blanc que blanc. "Shotgun Man" revient à la Soul Music, ce qui convient parfaitement au forcené qui la chante. "I’m Walkin'" achève le tout suivant une intro à la batterie qui file un tempo endiablé. On retrouve in fine l’âme du Killer qui se fend enfin de parties rageuses au piano, mais encore une fois l’orchestre de cordes et les chœurs féminins pastellisent l’ensemble, outre le fait que les deux minutes du morceau ne nous permettent pas de nous emballer alors que nous ne demandons que ça !

The Killer Rocks On déçoit donc. A priori, vu son titre, il s’agit d’un retour du Killer au rock rageur. Mais déjà, celui-ci est un brin trompeur car si Rock'n'Roll il y a bien, on y trouve itou des passages Country et de la Soul. Ce qui ferait plus tard le lit de l’excellent Southern Roots. Mais là où la tromperie se fait plus manifeste, c’est bien sur le sujet dudit titre : The Killer. Ici, le Killer en question ne fait pas trop de dégâts vu la propension générale de la production à rendre le tout bien propret. On eût apprécié que le sang coulât davantage de la part d’un Killer. The Killer Rocks On entrerait dans la case Variété US (donc internationale) plutôt que dans celle du Rock"n'Roll à proprement dit, mais comme on ne peut que s’abaisser devant la classe (aussi internationale) de Jerry Lee, on lui concédera volontiers cette dernière afin de référencer ce disque relativement dispensable en dépit des quelques fulgurances qu’il contient.

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   LONG JOHN SILVER

 
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1. Don't Be Cruel
2. You Can Have Her
3. Games People Play
4. Lonely Weekends
5. You Don't Miss Your Water
6. Turn On Your Love Light
7. Chantilly Lace
8. C.c. Rider
9. Walk A Mile In My Shoes
10. Me And Bobby Mcgee
11. Shotgun Man
12. I'm Walkin'



             



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