AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

Baby Snakes est tout d'abord un film. ZAPPA en a commis quelques uns. Celui-ci est est un mélange de séquences d'animation en pâte à modeler réalisées par Bruce Bickord, et d'un concert de 1977, le soir de Halloween, à New-York. Il faudra que je prenne le temps de m'intéresser au film, à un moment ou un autre. Mais nous parlons ici d'un disque ,et donc d'une bande originale de film. Disons juste que Bruce Bickford fait depuis longtemps partie de l'entourage de ZAPPA, et qu'il a réalisé bon nombre de ses pochettes de disques.

Baby Snakes est un Live, un vrai. Sans overdubs, sans innovation technique, reconstruction de morceaux ou resynchronisation. Un Live tout bête, avec un groupe et des chansons. Le problème de Baby Snakes, c'est que son contenu est déjà connu, ou quasiment. Revenons un peu en arrière : En 1978, ZAPPA est sous contrat avec la maison de disques Warner Brothers. Les relations ne sont pas bonnes, et ZAPPA projette de sortir un coffret de 4 disques, Läther, sur son propre label. Devant les menaces de procès de Warner, il finit par leur livrer les bandes, dont le nombre lui permettent d'arriver à la fin de son engagement.

Läther est une sorte de kaléidoscope de la musique de ZAPPA. Läther est un chef d’œuvre. Mais la Warner, ne sachant pas quoi faire de tant de musique, décide de faire son propre découpage, et de proposer 4 albums séparément, brisant l'unité qu'avait imaginé son auteur. L'un des 4 albums est ZAPPA In New-York, un enregistrement en concert datant de 1976. C'est une part non négligeable du chef d’œuvre. La musique de ZAPPA est arrangée pour ses musiciens habituels (Terry Bozzio, Ray White, etc.) et une section de cuivre à couper le souffle : Randy Brecker, Mike Brecker, Lou Marini, Ronnie Cuber et Tom Malone !

C'est pour cela que Baby Snakes pose problème. Le groupe est excellent, faut-il le préciser ? Mais on a l'impression d'avoir déjà tout entendu... en mieux ! ZAPPA, grand amateur de textures et de timbres avait su utiliser la section de cuivres de ZAPPA In New York de manière magistrale. Le son en était si ample, si riche, que ce qui ressort de Baby Snakes semble horriblement appauvri. C'est une histoire de dates. Si Baby Snakes était sorti en premier, nul doute qu'il aurait paru formidable, mais après, il semble terne.

Tout est pourtant là pour nous plaire : Terry Bozzio et Patrick O'Hearn, Adrian Belew, Ray White, etc. Même Punky's Whips, moment héroïque pour Terry Bozzio, semble comme vidé de sa substance. C'est terrible. Le groupe est incroyable, mais ça ne prend pas. Et je reviens sur les timbres : cela ne prend pas parce-qu'un synthétiseur ne vaudra jamais trois saxophones, un trombone et une trompette qui envoient du bois comme si leur vies respectives en dépendaient.

Alors, pourquoi avoir publié cet album ? A l'origine, il s'agissait d'un picture disc. On peut supposer que c'est un souci d’exhaustivité qui engendré la réédition en CD. Il s'agit donc d'un produit destiné aux "hard-core maniacs", qui seuls y trouveront un intérêt : une nouvelle version de « Dinah-Moe Humm », une autre de « Disco Boy », par exemple.

Je ne peux décemment pas mettre de 1 à un groupe pareil. Ce sera donc un 2, la mort dans l'âme, pour cet album qui aurait mérité bien davantage s'il n'avait eu un chef d’œuvre pour prédécesseur.