Avec La Vie Electronique 9, on touche à ce qui représente sans doute parmi les années les plus difficiles de Klaus SCHULZE. Le milieu des années 80 est en effet marqué par les problèmes de maisons de disques, et l'alcool. Un vrai fléau pourtant institutionnalisé, et dans lequel KS a hélas plongé. Forcément, l'impact s'est ressenti dans la musique qu'il a produite. Si Audentity et Dziękuję Poland, sortis tous deux en 1983, sont encore de bonnes factures, la majeure partie des albums sortis à l'époque sont au mieux pas terribles. Inter*face, Drive Inn, Aphrica... et du côté de Richard Wahnfried, on a eu Megatone.

Ça, c'est ce que ne montre pas La Vie Electronique 9. En effet, le premier volet de la série à sortir en 2011 montre un Klaus SCHULZE qui sort encore des pièces parfois belles, souvent inventives, qui peuvent se targuer d'être meilleures que ce qui a été publié à l'époque. Oui, on peut déplorer le fait de ne pas voir un morceau comme "Verblüffe Sie!" publié en 1985.

Mais d'abord, sur La Vie Electronique 9, il y a encore pas mal de live. C'est d'ailleurs ce qu'il y a en exclusivité sur le premier CD, avec Rainer Bloss aux côtés de KS. Tirés d'un concert donné à Budapest en octobre 1982, les trois morceaux respirent certes la qualité, mais il est compréhensible de faire l'impasse sur Per Leg Dance, nouveau doublon qui n'apporte décidément rien. "Ludwig Revisited" est à peine plus intéressant pour sa part. On avait déjà la même chose sur le live de 1983, à quelques notes près. "Die spirituelle Kraft des Augenblicks" est une sorte de croisement entre "Silent Running" et "Audentity" (toujours le piano de Bloss), et par défaut constitue le meilleur du CD 1.

Les deux autres disques, en revanche, relèvent largement l'intérêt à accorder à La Vie Electronique 9. Les choses ne commencent pas forcément bien, ceci étant, avec "Seltsam Statisch", énième doublon studio. Par contre, pour "Verblüffe Sie!" et "National Sound Waves", on touche déjà à autre chose. KS expérimente de nouvelles branches de la musique électronique, en jouant notamment la carte du minimalisme électronique. L'un comme l'autre présentent des structures certes simples et monotones (et pas seulement répétitives comme précédemment dans la discographie de Klaus Schulze), mais développent une ambiance SF qui paraît toute naturelle chez le monstre sacré de la Berlin School. Surtout, sans pour autant cacher leur âge, ces deux morceaux semblent être intemporels, et n'apparaissent pas sous un jour miteux... comme les productions contemporaines de KS qui ont trouvé les microsillons du vinyle. Oui, je parle bien de la maudite année 1984, avec son sinistre cortège. De même, KS nous sort de presque nulle part "The Midas Touch", une transe électronique aux accents légèrement sombres, sur un beat monotone mais prenant et jamais lassant. Après, il faut aimer, en tout cas plus que les deux précédents morceaux.

Outre le CD 1, La Vie Electronique 9 est donc un album à la qualité constante et remarquable – sauf pour l'affreux "Kompromisslose Inventions", un machin bruitiste. Il est vraiment dommage que KS n'ait pas publié ce genre de pièce à l'époque, surtout en comparaison de ce qui est sorti. Manque de discernement ? C'est possible. Simple question de goût ? Possible aussi, après tout, un artiste publie ce qu'il estime être bon, y compris pour lui-même. Heureusement que l'archéologie existe.