S'il y avait bien une chose à laquelle on ne s'attendait pas forcément, c'était un nouvel album studio de Klaus SCHULZE. Il faut dire que le héraut de la Berlin School paraissait déjà dans une petite forme à la sortie de Shadowlands en 2013, et l'idée de le savoir en retraite avait fini par s'installer dans l'esprit des gens. Comme toujours, des rumeurs de nouvel opus se pointaient, mais sans qu'on y croie vraiment. D'un autre côté, avec la série La Vie Électronique (2009-2015) et les différentes compiles retraçant les Contemporary Works (2000-2002), on avait notre content de K.S.

Pourtant, en 2018, un successeur à Shadowlands est finalement sorti. Son nom ? Silhouettes. Un album résolument crépusculaire, depuis la pochette. Désolé si ce qui va suivre paraît déprimant, mais c'est un fait : la plupart des grands noms de la musique sont en train de mourir les uns après les autres, et il faut plus que jamais considérer leurs dernières œuvres en date comme leurs dernières œuvres en cours. Certains de ces musiciens s'y refusent et d'autres, comme SCHULZE, l'acceptent volontiers. Un choix d'autant plus respectable que tirer sur la corde est en général une mauvaise stratégie.

Par conséquent, on serait tenté d'être plutôt bienveillant concernant Silhouettes, ne serait-ce que par le principe de clémence accordée au dernier album. Oui, mais ça va être difficile. En effet, l'album se place dans un ambient se distinguant par une homogénéité des plus remarquables, en descendance directe des Contemporary Works. Exit donc les pertinents ajouts de Shadowlands ou bien les séquences dynamiques de Kontinuum (2007), K.S. fait très simple, basique ici. Il y a bien quelques passages plus animés où le rythme s'emballe un peu, mais il n'y a là absolument rien de neuf ni de palpitant pour qui connaît tout son Klaus SCHULZE des années 2000. Il paraît donc évident que même le fan risque de se retrouver sceptique face à Silhouettes, à moins qu'il ne soit vraiment enclin à tout aimer chez un artiste.

Il n'y a réellement pas grand-chose de plus à dire au sujet de cet album. On pourrait broder sur des détails inutiles, disserter sur la 'fin de carrière', relativiser en évoquant le grand âge et la maladie de K.S., mais quand il n'y a plus rien, il n'y a plus rien. En fait, il est même curieux de se demander pourquoi la légende de la musique électronique s'est échinée à sortir Silhouettes, alors que Shadowlands aurait très bien pu faire une sortie plus qu'honorable. Et comme dit plus haut, les sorties d'archives parfois pertinentes et très intéressantes ne manquent pas depuis, ce n'est pas comme si chaque sortie de Klaus SCHULZE était un événement, notamment à notre époque. Cela dit, c'est peut-être la volonté de K.S. d'offrir une nouvelle œuvre inédite et récente à ses fans, auquel cas l'intention est louable et l'attention gentille.

C'est sur une note minimale que s'achève la carrière de Klaus SCHULZE. Et c'est avec un léger pincement au cœur qu'on voit s'achever la carrière d'un des plus grands génies de notre temps, un monstre sacré qui a grandement contribué aux grandes heures du krautrock avec ASH RA TEMPEL, puis a définitivement propulsé la musique électronique à un étage céleste, en compagnie de TANGERINE DREAM dont il a fait partie à la fin des années 60.