En 1988, Klaus SCHULZE est un homme content. Guéri du démon de l'alcool, il se décide à renouer les liens avec la musique de haute qualité – encore que Dreams était et reste son meilleur album dans l'absolu. L'inspiration revient en force, le compositeur allemand a envie de montrer qu'il est bien un géant de la musique électronique, qui sait s'adapter aux temps qui changent, musicalement parlant. C'est dans ce contexte qu'il réalise en un temps record – 3 semaines – En=Trance, un album à ne pas classer parmi les chefs-d'oeuvre, mais qui peut se prétendre bon opus. Par contre, la pochette peut clairement faire partie des 10 pochettes les plus belles de l'Histoire, assurément.

Alors que TANGERINE DREAM, par exemple, se vautre lamentablement dans des albums bourrés de titres courts et ô combien commerciaux, K.S prend le parti de sortir un album avec quatre longs titres. Enfin, l'adjectif 'long' est relatif : ces quatre titres en question ne dépassent pas les 20 minutes, ce qui fait moins grand que les plages de presque 30 minutes proposées dans le passé. Cette longueur relative n'a heureusement aucune incidence sur la qualité des morceaux en eux-mêmes. Mais autant prévenir tout de suite, les réfractaires à la répétition peuvent passer leur chemin : les variations sont ici très peu nombreuses – du moins encore plus que d'habitude chez SCHULZE. Ce qui est normal car K.S raisonne désormais par blocs, il en a - presque - terminé avec les structures en trois temps.

Le maître-mot de En=Trance est donc la répétition. Au vu du titre, cela paraît comme une évidence, mais c'est surtout en écoutant l'album que cet état de fait se montre évident. La meilleure preuve reste sans conteste "En=Trance" et son faux jumeau, "α-Numerique". Les deux morceaux partagent en effet la même structure, avec une intro aussi sombre que captivante et variée, et une suite bien plus monotone. C'est d'ailleurs là que le bât blesse. K.S s'est certes imposé comme un génie dans la musique répétitive, mais il manque de l'émotion. L'expression 'pilotage automatique' pourrait même être employée, mais cela conviendrait pour des morceaux franchement mauvais, ce qui n'est pas le cas ici. Il y a aussi de quoi être suspicieux à l'écoute de "Velvet System" qui ressemble à presque s'y méprendre à une version plus énervée de "En=Trance" à partir de la cinquième minute. Cette redondance à la limite du remplissage n'est cependant pas mauvaise. Mieux, une légère impression de relecture pertinente s'impose et fait passer au final un bon moment.
Le morceau cependant à retenir est bien évidemment "FM Delight". Toujours doté de la même structure que les autres titres, il se démarque par une émotion cette fois bien présente (trop, même ?) obtenu avec des nappes de synthés sublimes. Pour faire simple, "rêve" est le premier mot qui vient à l'esprit. Une mélancolie à la fois organique et mécanique (humaine, quoi) se met en place. Sans parler de Beau, "FM Delight" figure bien dans la liste des plus beaux morceaux de K.S. Il est en revanche dommage que le caractère répétitif typique de l'album le stérilise quelque peu.

En=Trance est un album bien beau et assez bien ficelé, ce qui a été soulevé par des critiques satisfaits à l'époque de sa sortie. Il faut néanmoins admettre que son aspect répétitif, s'il ne rebute pas le moins du monde, a été trop amplifié. Toutefois, Klaus SCHULZE qui expose de nouveau son talent finit bien mieux qu'il n'avait commencé les années 80.