Après la tornade "Souvenirs, Souvenirs" de 1960, Johnny HALLYDAY, roi sur scène, peine quelque peu à s'imposer dans l'esprit du public avec des chansons véritablement marquantes. Il enchaîne les E.P, entrecoupés par la publication de 33-tours 25 cm ou, plus rarement, 30 cm.

Cependant, son temps au sein de la maison de disques Vogue est compté. En dehors du manque de succès sur disque, Johnny ne peut s'accorder avec le tempérament réputé bouillonnant de Jacques Wolfsohn, le patron (son vieil ami Jacques DUTRONC y arrivera beaucoup mieux !).

Tête à Tête avec Johnny Hallyday (juillet 1961) est le dernier disque paru chez Vogue. Auparavant, et en reprenant une pochette d'un E.P récent, l'équipe qui entoure le chanteur a même essayé de relancer le titre sulfureux "Laisse les Filles" (sur Hello Johnny, 1960) en single.

Au final, c'est un nouveau 33-tours 25 centimètres, pas le dernier (le support sera encore à la mode jusqu'au milieu des années 60), taillé pour huit chansons, donc deux E.P (parus en mars et juin), en comparaison avec les 30 centimètres qui peuvent contenir trois E.P et douze chansons.

Quantité ne signifie pas qualité forcément, c'est certain. Le live au festival de rock'n'roll paru en avril l'a bien montré, il y avait ce qu'il fallait, sans longueur. Tête à Tête avec Johnny atteint presque le même niveau côté studio, même si là encore, l'absence de tube se fait cruellement ressentir.

Ce n'est pas la reprise de "24000 Baci", ici "24000 Baisers" qui nous fera penser le contraire. Après les COUSINS belges, c'est au rock'n'roll italien que Johnny rend hommage en empruntant à son collègue Adriano CELENTANO, son équivalent de l'autre côté des Alpes. Elle est bonne cette reprise, là n'est pas la question ! Peut-être lui manque-t-il un brin de caractère, eu égard à l'originale indétrônable. Parfois, le souci des adaptations de Johnny, c'est qu'elles semblent trop linéaires, trop scolaires.

Il fait mieux pour la reprise d'Elvis PRESLEY, "You're So Square (Baby I Don't Care)", "Sentimental". Le texte "bébête", comme le veut l'esprit rock'n'roll dragueur, est adressé à une jeune femme romantique, complètement dépassée par la mode et à qui Johnny fait du gringue. Sans valoir les interprétation du King ni même celle de l'immense Buddy HOLLY, c'est un bel effort.

À côté de ça, on a un disque de facture honorable. Le premier morceau "À New Orleans" est une sympathique entrée en matière, bel hommage au berceau du blues et du jazz malgré quelques formules franchouillardes qui laissent perplexe, sauf si on envisage que c'est du second degré. À ce propos, Johnny fait bien valoir son accent en minaudant "Toi qui disais que l'amitié, aooow oui, que l'amitié était la chose la plus sacrée...", sur la ballade country "Mon Vieux Copain", naïve mais jolie.

Celle-ci et les autres compositions de HALLYDAY avec ses amis Jil et Jan sont honnêtes, on retient particulièrement "Si Tu Restes Avec Moi", aussi énergique et réussie que la reprise de Chubby CHECKER, "Hey Pony" ("Pony Time"). Au moins, si le contrat avec Vogue s'arrête fermement, c'est en bons termes musicaux.