Le Flashback Tour de Johnny, un retour aux sources comme disent la presse écrite et la télé. Il est vrai qu'en tout cas c'est un nouveau changement dans la formule et monsieur HALLYDAY choisit un groupe bien allégé, en choeurs comme (surtout) en cuivres. Groupe plus rock, mieux taillé pour les ambiances intimes, même si nous sommes dans une salle importante en général, et notamment pour lui, Johnny, pour sa carrière, où il n'était pas revenu depuis 1983.

Le titre suggère donc un large retour en arrière et aux périodes les plus rock qu'il a traversées, la fin des années 60 en particulier. Le problème, c'est qu'un rockeur avec un tel degré de popularité qui ne fait que du rock, en France, ce n'est pas aisé à faire. Et, double risque, quand le dernier album en date s'appelle Ma Vérité (2005).

Là où on aurait pu avoir une véritable tournée rock'n'roll/rock psychédélique, un hommage total aux dix premières années de Johnny HALLYDAY, on se retrouve avec un mélange de nostalgie, de Ma Vérité et de quelques titres qui se devaient d'être là, même s'ils se trouvent isolés. Quoique "L'envie" figure en bonne place, tout au début, juste après l'intro coutumière, vite pliée : un bruit de vent et des cordes qui font le rythme du tube de 1986. Elle commence de manière sombre, comme durant les années 90, avec juste les claviers et la voix du patron, les instruments restants n'arrivant qu'après le deuxième refrain. Gros souci en revanche : les marimbas-synthé du passage instrumental.

D'électronique, il n'y en a point trop ici. Eric Chevalier n'aide que modérément Yvan Cassar dans ce live davantage accès sur le couple piano-orgue, et surtout les guitares, basse comprise – l'excellent Laurent Vernerey – et la batterie derrière laquelle prend place Geoff Dugmore, musicien de session écossais, place durable en ce qui le concerne. Ray Hermann est le seul des Vine Street Horns présents, et aux choeurs, Johnny "pique" cette fois à Phil COLLINS sa choriste Amy Keys.

"Je Suis Né Dans la Rue", "Le Bon Temps du Rock'n'Roll", "Gabrielle" (cette guitare so rock'n'roll !), "O Carole", "Allumer le Feu", "La Musique Que J'aime" sont autant de hits attendus que Johnny et son groupe enfilent sans jamais ennuyer. Le patron est en bonne forme vocale, mais il a vraiment tenu à donner une place de choix à son dernier album. Même débarrassés du carcan studio tout poli et propre, "Ce Qui Ne Tue Pas Nous Rend Plus Fort", "La Paix" et "Si Tu Pars" restent ce qu'elles sont, tout sauf de grandes chansons. Au moins, les plus rock d'entre elles ont une belle énergie et s'intègrent plutôt pas mal au reste, contrairement à "Mon Plus Beau Noël" qui n'est touchante qu'à travers son chant... Johnny reste Johnny.

Là où on ne peut éviter "Marie", on est content de retrouver "J'oublierai Ton Nom" dans une version soft émouvante dotée d'une très belle partie de piano folk par Yvan Cassar et d'une Amy Keys très juste. Pendant que Johnny fait une pause, c'est cette brave dame qui conduit son trio de choristes pour interpréter "Proud Mary", non pas l'originale de CREEDENCE CLEARWATER REVIVAL, mais évidemment celle détonante d'Ike & Tina TURNER, passage obligé pour toute chanteuse soul en herbe qui veut balancer la sauce. Keys n'est plus à ce stade, loin de là, et le sax de Ray Hermann apporte un gros bonus à cet instant rhythm'n'blues vitaminé.

La Strat' de Robin Le Mesurier fait chauffer "Hey Joe", et Geoff Dugmore offre une démonstration de son superbe jeu de batterie avant la très belle montée finale. Lui et Nicolas Montazaud aux percussions se réservent même un "drum duet", duo de peaux frappées vigoureusement (puisqu'on parlait de Phil COLLINS...) sur le final du génial "Voyage au Pays des Vivants". La grosse surprise de ce live, c'est quand même la présence de "Rivière, Ouvre Ton Lit", avec solo de flûte, plus rapide et moins psychédélique, mais toujours aussi passionnante. Bon sang Johnny, pourquoi ne pioches-tu pas plus souvent dans cette période, ces titres-là en dehors des plus connus ?

Au rang des curiosités, "La Loi du Silence" rappelle un peu la chanson dédiée à Adeline, un gros rock sudiste/western sur des paroles oppressantes. Sympathique, mais il y a plus intéressant : "Seul au Beau Milieu d'un Lac", inédit total sur un mode blues pépère qui, décidément, sied fort bien à Johnny. En rappel, celui-ci rend un hommage vibrant à Jacques BREL ("La Quête"), piano-voix devenu traditionnel. Et à ce propos, même si on l'a 1000 fois entendue elle aussi, difficile de ne pas craquer pour cette version nébuleuse du "Pénitencier". L'arpège coulé à la guitare sur le pont, miam...

Sans doute pas l'un des concerts les plus mémorables de Johnny, ce Palais des Sports 2006 n'est en effet pas assez flashback, hélas, mais il reste un des plus beaux de la décennie 2000 et a de quoi se défendre, même face au deuxième live (eh oui !) sorti tantôt cette année.