Hollywood, ou l'album esbroufe. Un peu comme la ville d'ailleurs qui voit tout en grand et le transmet ainsi, y compris ses lettres sur la colline visibles depuis l'extérieur, qui mise beaucoup sur l'apparence et fait rêver tel un paradis, mais où tout peut si vite tourner au vinaigre également et on peut facilement ne plus y compter pour rien.

La pochette du nouveau disque de Johnny, onze ans après Rêve et Amour, semble être un détournement de cette dernière, aussi bariolée mais dans un contexte radicalement différent. Le verso montre bien que tout n'est qu'apparence et futilité. Le problème, c'est que l'album est pareil !

Réalisé par Eddie "beau-frère" Vartan et Bob Margouleff, il permet à Johnny de retrouver la notion de groupe plus libre que les orchestres des disques précédents, avec de nombreux musiciens de session réputés : Ernie Watts, Reggie McBride, Greg Phillinganes, Paulinho Da Costa, Charles Rainey le bassiste de STEELY DAN.

Ces noms doivent mettre la puce à l'oreille, d'autant plus que nous sommes en pleine période soft-rock, Christopher CROSS etc. L'enregistrement à Los Angeles est un passage obligé pour une star française, aux mythiques Record Plant Studio notamment. C'est une époque de "nouveaux hippies", mais aussi celles des divorces et de la cocaïne.

Malgré tous ces éléments donc, le nouveau disque de Johnny sent le produit bien fait, clinquant mais tout aussi vide dedans. Déjà, "Le Bon Temps du Rock'n'Roll", adapté de Bob SEGER ("Old Time Rock'n'Roll"), un de ses tubes les plus célèbres, est présenté dans une version poussive, bavarde et au chant assez éprouvant. Elle a le mérite de récompenser enfin le Johnny rock après tant de ballades, mais n'aide pas l'album à finir numéro 1 des ventes, et de toute façon, il fera mieux en live.

C'est l'un des rares tempos similaires du disque, avec "Comme un Voleur", qui ne laissent pas un souvenir impérissable. Le côté soft-rock est mal exploité, presque "pour faire comme si", surfer sur la vague et suivre la mode, sans réelle profondeur. Sans compter que les arrangements, malgré les musiciens employés, sonnent creux.

Ce n'est certes pas toujours le cas, "Tout M'enchaîne" incarne idéalement le son de cette période avec son texte désabusé et son influence caribéenne, tandis que "Ce Que Tu As Fait de Moi", co-écrit par Eddie Vartan et Michel Mallory, semble échappée de la face A de Solitudes à Deux, en termes de style et de qualité. Dans le tube, Johnny dit avoir une indigestion de disco mais force est de reconnaître que le refrain de "Le Coeur Comme une Montagne", emprunté aux BABYS ("Isn't It Time") fonctionne bien, comme tout le morceau d'ailleurs.

À côté de cela, la reprise de Jimmy CLIFF, "You Can Get If You Really Want"/"T'as le Bonjour de l'Amour" nous permet d'entendre Johnny dans une couleur reggae-zouk assez malvenue, tout comme le texte proposé. Ne parlons pas de "Fais Ce Que Je Dis (Pas Ce Que Je Fais)", une bonne idée de base sans doute, mais assez irritante au final, avec ses références à l'alcool et à la drogue et le disco ne rattrape rien cette fois.

Durant l'année 1979, les chansons "hors-album" sont souvent meilleures que celles qui le constituent. Il y aura bien sûr "Ma Gueule", son dernier tube avant longtemps, mais avant ça et dans la tonalité soft-rock de Hollywood, on peut parler du single paru cinq mois après, fin juin. La ballade "C'est Mieux Ainsi" après un début acoustique rejoint "Qu'est-ce Que Tu Croyais" dans son élan pop, et on apprécie le caractère nerveux de cette dernière, les hurlements de Johnny sur fond de musique ensoleillée.