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Joseph HAYDN - Sonate Pour Clavier N°38 Hob Xvi:23 (horowitz) (1773)
Par CHIPSTOUILLE le 9 Mars 2016          Consultée 3425 fois

La maturation de ce texte fut longue, et pour cause, il n’y a pas grand-chose à dire de la sonate n°38 Hob XVI:23 de Joseph HAYDN. Pas de paroles, peu de contexte, encore moins de points distinctifs. Mais que dira-t-on de ces millions de chansons pop qui parlent d’amour, de mort ou de guerre dans 250 ans? Pourtant chaque trimestre, une nouvelle vague vient chasser la précédente, une vague qui sera de nouveau chassée par la suivante dans quelques temps. Si l’on se retourne quelques secondes pour faire le point, on s’aperçoit par exemple que ces dernières années, malgré la crise du support physique, une certaine ADELE est parvenue à se frayer un chemin parmi les records de ventes de disques pour la plupart établis dans les années 80 et 90.

Ce qui distingue ADELE du commun des chanteurs actuels est impalpable, presque imperceptible. Une blanche qui chante comme une black? La belle affaire, on disait la même chose d’Ophélie WINTER il y a 20 ans. Il doit y avoir un savant mélange d’ingrédients, une façon d’interpréter les choses qui touche un peu plus qu’à l’accoutumée, et qui crée le succès. Il éclot grâce à cette sphère de personnes qui d’habitude ne s’intéresse pas ou peu aux affaires musicales, et qui participe involontairement, de par son nombre inhabituel, à cette spirale vertueuse du bouche à oreille. Viennent dans ce mouvement de masse s’empiler diffusions radio à répétitions et publicités qui se nourrissent d’elles-mêmes. Une star est née.

Pourquoi parler d’ADELE alors que la chronique est supposée être dédiée à cette sonate n°38 de Joseph HAYDN? Parce que cette sonate est à la fois l’exact opposé et l’équivalent de "Hello" ou "When we were young" en 1773. L’exact opposé car ce n’est pas cette sonate qui permit à HAYDN de laisser son nom à la postérité, loin s’en faut. C’est également l’équivalent des titres les plus fameux d’ADELE car sur le papier rien ne permet ici de la distinguer de ses contemporaines. Peut-être vous rappelez-vous cette scène au début d’Amadeus, où F. Murray Abraham incarnant Antonio SALIERI à l’écran, venait déchiffrer les partitions de MOZART reposant encore sur leurs pupitres. Il s’étonnait alors de cette simplicité presque injurieuse sur le papier, qui pourtant, par miracle, se transformait soudainement en "beau", une fois tous les éléments en place.

La sonate n°38 de HAYDN n’aura probablement pas provoqué l’émerveillement d’Antonio SALIERI, si toutefois celui-ci était venu à la découvrir. Trop peu originale et d’apparence trop simple pour générer la spirale incontrôlable du succès, elle manque également d’audace pour rester dans les mémoires. Néanmoins, à l’image de la sérénade « Gran partita » de MOZART qu’il portait ainsi aux nues, on reconnaîtra à la sonate de HAYDN des qualités qu’elle dissimule sous ses faux airs de ne pas y toucher.

Son allegro moderato en est très certainement la plus brillante démonstration. Le premier thème, gentillet, énonce ses notes de manière intelligible, trop pour susciter le moindre étonnement. C’est une diversion, qui permet à HAYDN de nous engouffrer dans un développement énergique et rapide des plus surprenants. L’auditeur est entraîné dans cette succession de péripéties qui oublient tout de la bonhomie de façade. Jusqu’au retour du premier thème, qui sonne brutalement la fin de l’aventure. Les moins attentifs ne retiendront malheureusement que celui-ci. Pourtant, entre ses reprises, ce n’est peut-être pas du niveau d’un Fantaisie Impromptu de CHOPIN, mais on s’évade tout de même quelques instants.

Le finale réalise la même prouesse, masquant son développement riche en rebondissements entre les énonciations multiples d’un thème peu mémorable. L’adagio central, magique, dont la mémoire a également été érodée par le temps, livre un sans faute. Pour en profiter pleinement, il faudra toutefois aller chercher vers les meilleurs interprètes. Le quasi inconnu Milos Popovic nous en livre une lecture délicate, disponible sur Youtube à l’heure où j’écris ces lignes, et qui mérite plus de reconnaissance. Hélas, trouver celui-ci sur disque s’avère plus compliqué. On pourra se rabattre sur la version d’Horowitz, qui bien qu’elle accuse son âge avancé question qualité sonore, ne démérite pas concernant l’interprétation.

Loin des chansons les plus célèbres d’ADELE, la sonate pour piano n°38 de Joseph HAYDN est restée discrète de tous temps, bien que mise en valeur dans le répertoire pour piano de quelques rares interprètes. Contrairement à l’adagio K.540 de MOZART, elle n’est pas restée à la postérité. Ce qui n’est pas une injustice, nombreux seront ceux qui continueront à l’ignorer. Sans-doute ont-ils raison, peut-être lui manque-t-il les quelques ingrédients magiques qui permettent d’enclencher les premiers tours de la spirale du succès. Quelques chanceux auront tout de même eu la chance de s’y recueillir. Des qualités suffisantes s’y dissimulent pour assouvir, le temps de son écoute, l’appétit musical de certains.

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- Vladimir Horowitz (piano)


- sonate N°38 Pour Piano En Sol Hob Xvi:23
1. Allegro Moderato
2. Adagio
3. Finale - Presto



             



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