AVERTISSEMENT : cette chronique de bande originale de film est également susceptible de contenir des révélations sur le film

"OK, on sait que le scénario de Planes et certains de ses personnages sont calqués sur Cars. Après les voitures, les avions, d'accord, mais ce n'est pas une raison pour ne pas le trouver sympa et l'aimer quand même !" Voilà ce qu'on pourrait répondre, en haut lieu dans les couloirs-passerelles de DISNEY/Pixar, quand on s'appelle Klay Hall et qu'on vient de réaliser un projet aussi important, après avoir passé des années à gérer des séries animées (Les Simpson et le film Chéri Fais-Moi Peur, puis Les Rois du Texas et Le Roi de Las Vegas).

C'est vrai qu'il a de quoi se défendre, ce film qui a tout d'un Pixar, et des éléments communs flagrants avec Cars (2006), la course grand prix - même si là elle est le fil conducteur de l'histoire -, les grands espaces, le rapport rookie (petit nouveau) déterminé/ancêtre qui porte un fardeau du passé... Une bonne distribution d'abord en anglais : Teri Hatcher, John Cleese (l'avion britannique et cynique, bien sûr), Val Kilmer pour des rôles plus ou moins importants. Et dans la fiche technique, de manière tout à fait anodine alors que des années ont passé depuis Tarzan (1999) et Frère des Ours (2004), on voit apparaître le nom de Mark MANCINA.

Pour une fois, pas de NEWMAN ni de GIACCHINO, une première pour Pixar si l'on excepte Rebelle (2012) qui était plus proche d'un DISNEY classique. MANCINA, c'est bien lui le responsable qui, en écho à ce qu'avait fait Randy NEWMAN pour Cars, se charge d'une bande originale très américaine. Et de qualité, mais pour des raisons différentes. La part de diversité reste de mise, mais MANCINA préfère, au caractère blues-country rural, un son plus rock mêlé d'orchestre. Il n'est donc pas rare de croiser des guitares rugueuses au beau milieu d'envolées de cordes et de cuivres, une batterie rock qui se substitue aux caisses claires et tambours massifs.

Du gros son, mais qui n'a rien de ridicule : c'est même très, très bon ! Dès le départ, on a droit à une chanson pop-punk de Mark HOLMAN, "Nothing Can Stop Me Now". Dans un registre funk, il y a ensuite "Fly" de Jon Stevens (membre du groupe DEAD DAISIES) bien balancé également même si trois fois présent dans le film, c'est légèrement insister. Enfin, pour l'arrivée à New York avant le début de la course, un peu de rap, comme pour Cars, avec Chris CLASSIC et son "You Don't Stop", tout aussi bon dans un style "old-school" avec la seule voix féminine chantée du film, celle d'Alana D. Tous ces titres sont repris au générique de fin, comme c'est l'usage désormais.

Durant ce même générique, un thème court mais sympathique met en valeur un banjo et une touche doo-wop qui rejoint comme rarement l'esprit NEWMAN 2006 dans le même contexte. Enfin, une chorale a-cappella ferme l'ensemble de fort belle manière. On l'entend durant quelques morceaux épiques, pour certaines parties de la course, et on se souvient que Mark MANCINA était un des arrangeurs pour le Roi Lion (1994). Lors de ces mêmes moments, l'orchestre nous en met plein les oreilles, mais comme à l'époque, ça fonctionne et les mélodies ne sont jamais "noyées".

C'est un point positif de cette bande originale qui enchaîne les thèmes courts, parfois trop comme lorsque le vieux Skipper essaie de voler la nuit (le final sur le porte-avions, en revanche, est un régal qui se laisse suffisamment goûter), ou alors la guitare acoustique sur laquelle plane un hautbois généreux après la course de qualification au début. Et puis il y a l'effet tour du monde, avec des adaptations à l'endroit où l'on se trouve, quand ce n'est pas l'inverse, à l'image de "The Girl From Ipanema" pour l'arrivée en Islande sous la neige, une bonne cocasserie !

Si l'humour n'est pas franchement critiquable pour cette fois, mis à part deux ou trois jeux de mots forcés, l'avion mexicain El Chupacabra, un allié de Dusty (le protagoniste) entraîne dans son sillage tout un pan de légèreté folk, cha-cha, serenade, trompettes mariachis et compagnie, kitsch mais classe malgré tout. En Inde, lors de la séquence romantique sur le Taj Mahal, on entend "Tere Bina", un des titres les plus connus du regretté chanteur pakistanais Nusrat Fateh Ali KAHN, et pour l'arrivée au monastère du Népal, une musique vocale angélique. Bref, Planes, contrairement aux idées reçues, c'est, sans atteindre les sommets, à entendre comme à voir !